Le programme de recherche Liminal (Linguistic and Intercultural Mediations In a context of International Migrations) réunira à l'Inalco chercheurs européens, acteurs institutionnels et associatifs, traducteurs, migrants et artistes lors d'un colloque international. Ce colloque sur deux jours se déroulera en quatre panels de communications et deux manifestations culturelles.
Un projet financé par l'ANR (Agence nationale de la recherche) et porté par trois laboratoires de l'Inalco (CESSMA-CERLOM-PLIDAM).
Mardi 10 septembre 2019 - 09:00 - Mercredi 11 septembre 2019 - 20:00 - Auditorium
Inalco (PLC) - 65, rue des Grands Moulins - 75013 Paris
Entrée libre sans inscription
L’urgence dans les langues : interactions, médiations et inventions langagières en migration
Depuis novembre 2017, les chercheur.e.s de Liminal étudient les interactions et les médiations langagières dans les temporalités de l’urgence, dans les centres et campements d’Ile de France, du Calaisis et de la frontière franco-britannique, à Briançon et à la frontière franco-italienne. Ces lieux sont autant d’espaces où la communication et la diffusion d’informations est à la fois vitale et entravée. Aux contraintes physiques et psychiques qui s’exercent sur les sujets exilés s’ajoutent fréquemment des violences dans les langues et dans la traduction, insuffisante, inadaptée ou autour d’intraduisibles. Les langues dans l’urgence sont aussi, en conséquence, une urgence des langues.
A mi-parcours des travaux du programme Liminal, un premier état des lieux sur les langues dans l’urgence peut être envisagé dans ses différents aspects : juridiques et pratiques (accès à l’information, guides et niveaux de langues, outils de diffusion) ; structurels (profils et fonctions des locuteurs engagés dans l’accueil et l’hébergement, représentations de la langue) ; de médiation (niveaux de traduction et de langues, médiateurs-pairs…) ; subjectifs (de position, d’engagement, de formes d’interaction) ; langagiers enfin, avec la création de nouveaux vocabulaires et de lexiques véhiculaires dans le vif de l’expérience. Glissements d’une langue à l’autre, emprunts et stratégies linguistiques par des populations multilingues, appropriation d’acronymes, détournements de sens, transformations des référents, caractérisent ces inventions élaborées pour et contre l’urgence, par utilité et résistance. Ces « bricolages » sont aussi ceux de salariés et aidants du premier accueil ; ils créent une zone de possibilités et d’incertitudes dans laquelle la communication non-verbale joue également un rôle important.
Cet espace des langues et des pratiques langagières, octroyé ou conquis, met à l’épreuve les représentations de la nation et de l’hospitalité, les constructions croisées de la figure « des migrants » et de l’étranger, de leurs langues et cultures. Il questionne les fonctions des acteurs locuteurs et la diversité de leurs statuts (interprètes, médiateurs, « traduisants » informels), leurs relations avec les acteurs non locuteurs (acteurs étatiques, associatifs, bénévoles, militants, chercheurs etc.). Plus généralement, cette crise des langues dans l’accueil interroge les modalités de gestion de la « crise » migratoire, entre obligations légales et évaluation des besoins.
De fait, à travers les langues, ce qui se dessine est la place faite au sujet exilé, à la fois comme individu et comme élément dans un dispositif d’accueil lui-même en crise. C’est précisément sur ces enjeux que ce colloque entend revenir dans une perspective résolument multidisciplinaire réunissant dans chaque panel chercheurs et acteurs, réflexions et pratiques.