Colloque international « Millénaire Rrom : Bilan et perspectives », les 5 et 6 novembre en visioconférence
Ce colloque international organisé par l'équipe de recherche PLIDAM célèbre plusieurs dates marquantes dans l'histoire du peuple Rrom : la Journée mondiale de la langue rromani (le 5 Novembre) ; le millénaire de O Baro Telăripen – Le grand déplacement (1019) ; les six cents ans de présence attestée des Rroms en France (1419) et le trentième anniversaire de l’orthographe unifiée du rromani (adoptée au Congrès de Varsovie, 1990). Les 5 et 6 novembre 2020, en visioconférence.

Le grand déplacement (1019) - O Baro Telăripen © Ornella Rudeviča
La Journée mondiale de la langue rromani proclamée en 2015 par l’UNESCO est célébrée tous les ans le 5 novembre. Elle vise « à encourager la préservation de la langue romani et de la culture rrom, améliorer le bien-être des Rroms et reconnaître l’importance de toutes les langues, dont la diversité est une source de force pour toutes les sociétés. »
Organisé à cette occasion, ce colloque international célèbre également plusieurs dates marquantes dans l'histoire du peuple Rrom :
- le millénaire de l’exode des ancêtres des Rroms de la ville de Kannauj en Inde (actuel Uttar Pradesh), fêté en grande cérémonie en Inde en 2019 dans les hauts lieux les plus prestigieux du pays ;
- le sixième centenaire de la première mention de Rroms en France (août 1419) à Châtillon-sur-Chalaronne ;
- le trentième anniversaire de l’orthographe unifiée du rromani, adoptée au Congrès de l’Union Rromani Internationale à Varsovie en 1990
Evénement organisé par l'équipe de recherche PLIDAM - Pluralité des Langues et des Identités : Didactique – Acquisition – Médiations (Inalco)
Du jeudi 5 novembre - 09:00 au vendredi 6 novembre 2020 - 19:00
Comité scientifique
Ursula Baumgardt, PU, PLIDAM
Frosa Pejoska-Bouchereau, PU, PLIDAM
Thomas Szende, PU, Directeur de PLIDAM
Aliou Mohamadou, PU, PLIDAM
Marcel Courthiade, MCF HDR, PLIDAM
Organisateurs
Marcel Courthiade, docteur en sciences du langage ; maître de conférences habilité à diriger des recherches ; titulaire depuis 1997 de la chaire de langue et civilisation rromani à l'Inalco ; commissaire à la langue et aux droits linguistiques de l’Union Rromani Internationale ; consultant de plusieurs gouvernements pour l'éducation des Rroms. Biographie et bibliographie de Marcel Courthiade.
Dernier ouvrage publié : Petite histoire du peuple rrom. Première diaspora historique de l’Inde, Paris, Le Bord de l’eau, 2019
Mila Dragović, docteur en traductologie, professeure certifiée de Lettres modernes, membre de PLIDAM
Iovanca Gaspar, doctorante en sociolinguistique, Université Friedrich Schiller, Iéna
Ce colloque a pour but de promouvoir une meilleure connaissance des Rroms et de leur culture, de contribuer à remettre en question certains stéréotypes profonds et récurrents sur ce « peuple sans frontières », dont le ciment n’est ni le territoire matériel, ni la religion et ses dogmes, mais la langue et le sentiment profond d'être spécifiquement Rrom. L’exemple de ce peuple – qui a souffert à travers l’histoire ce qu’il y a de pire : l’exode forcé, l’esclavage et le génocide – a beaucoup à nous enseigner sur la construction des ponts entre les cultures1 et sur la nécessité de donner à tous une éducation en langue maternelle – axe qui fait partie de la vision fondatrice de l'UNESCO –, ou une éducation décente tout court. Il nous interpelle sur de nombreuses questions actuelles dans notre société moderne: le respect des minorités, la diversité, l'intégration sous ses diverses conceptions, le respect mutuel, la tolérance… mais aussi les dévoiements possibles de ces nobles desseins. Ces questions présentent certes une connotation morale et politique, mais nous nous proposons de les aborder d'un point de vue scientifique, présageant de conclusions qui pourront être utiles pour bien d'autres.
Le peuple rrom vient de la moyenne vallée du Gange, en Inde du Nord, même s'il ne s'est constitué en ethnie consciente de sa spécificité qu’en Asie Mineure, où il s’est installé après l’exode forcé de leur berceau Kannauj. Cette ancienne capitale de l’Inde a été pillée en hiver 1018-1019 par le sultan Mahmoud de Ghazni, qui en a déporté presque toute la population, soit « 53.000 hommes, femmes et enfants, pauvres et riches, clairs et sombres de teint, par familles entières ».
A travers des siècles de statut sub-humain qui leur a été infligé, notamment lors du Samudaripen perpétré pendant la Seconde guerre mondiale, les Rroms ont gardé leurs coutumes et leurs valeurs, leur organisation sociale, leur langue et leur musique bien vivantes, ainsi que leur identité et leur dignité.
La langue rromani appartient à la même famille que le sanskrit, dont elle est demeurée particulièrement proche. Sa vitalité à travers les siècles est prouvée par le fait qu’elle est utilisée encore dans le quotidien par environ une moitié des 15 à 20 millions de Rroms à travers le monde, ce qui est un miracle comparé à l’état de fait linguistique d’autres diasporas. Le rromani comporte quatre dialectes, dont l’alphabet commun a été officialisé en 1990. Au-delà d’une littérature orale très riche, une littérature écrite s’est développée depuis les années 1920.
Avec le yiddich et l’arménien occidental, le rromani est une des plus représentatives parmi les langues « sans territoire compact » (il y en a dix en Europe), qui nous offrent une vision du patrimoine et de l’identité bien différente de la notion de territoire. Comme l’écrivait le linguiste Bernard Cerquiglini dans son rapport sur les langues de France, « le vrai territoire d’une langue est la tête de ceux qui la parlent ».
Cette manifestation scientifique sous l’égide de PLIDAM se situe dans la droite ligne du message délivré le 5 novembre 2019 par Mme Audrey Azoulay, directrice générale de l’UNESCO, dont voici un extrait :
« Avec la langue romani – « Romani čhib » – s’offre à l’humanité entière l’archive vivante d’une longue histoire migratoire. Ses 17 dialectes, ses 33000 mots retracent les influences nombreuses et diverses qui l’ont façonnée : aux racines sanskrites et hindi, s’ajoutent des origines persanes, arméniennes, ou encore grecques.
Cette langue ancienne, riche de cette histoire connectée, est aujourd’hui menacée d’extinction. Avec elle, c’est l’identité, la culture et un patrimoine riche en connaissances et en savoir-faire qui sont en péril.
Cette journée mondiale de la langue romani est l’occasion de la mettre en avant, dans sa richesse et dans sa singularité, afin qu’elle soit mieux comprise et protégée au mieux.
Cela passe par son enseignement, en particulier pour les enfants roms dont c’est la langue maternelle car une langue vivante est avant tout une langue qui se pratique au quotidien ; mais cela passe aussi par des politiques ambitieuses pour lutter contre toutes les formes de discrimination et pour soutenir les Roms, leurs droits fondamentaux, leur inclusion sociale et leur développement.
Protéger leur langue, c’est travailler à leur considération ; préserver leur langue, c’est aussi contribuer à un monde dont la polyphonie est un atout. Chaque langue qui disparait est un appauvrissement de notre humanité, un rétrécissement anthropologique contre lequel il convient de lutter de toutes nos forces. »
La Journée mondiale de la langue rromani proclamée en 2015 par l’UNESCO est célébrée tous les ans le 5 novembre. Elle vise « à encourager la préservation de la langue romani et de la culture rrom, améliorer le bien-être des Rroms et reconnaître l’importance de toutes les langues, dont la diversité est une source de force pour toutes les sociétés. »
Organisé à cette occasion, ce colloque international célèbre également plusieurs dates marquantes dans l'histoire du peuple Rrom :
- le millénaire de l’exode des ancêtres des Rroms de la ville de Kannauj en Inde (actuel Uttar Pradesh), fêté en grande cérémonie en Inde en 2019 dans les hauts lieux les plus prestigieux du pays ;
- le sixième centenaire de la première mention de Rroms en France (août 1419) à Châtillon-sur-Chalaronne ;
- le trentième anniversaire de l’orthographe unifiée du rromani, adoptée au Congrès de l’Union Rromani Internationale à Varsovie en 1990
Evénement organisé par l'équipe de recherche PLIDAM - Pluralité des Langues et des Identités : Didactique – Acquisition – Médiations (Inalco)
Evénement en visioconférence sur la plateforme Zoom Inscription obligatoire sur cette page. |
Du jeudi 5 novembre - 09:00 au vendredi 6 novembre 2020 - 19:00
Comité scientifique
Ursula Baumgardt, PU, PLIDAM
Frosa Pejoska-Bouchereau, PU, PLIDAM
Thomas Szende, PU, Directeur de PLIDAM
Aliou Mohamadou, PU, PLIDAM
Marcel Courthiade, MCF HDR, PLIDAM
Organisateurs
Marcel Courthiade, docteur en sciences du langage ; maître de conférences habilité à diriger des recherches ; titulaire depuis 1997 de la chaire de langue et civilisation rromani à l'Inalco ; commissaire à la langue et aux droits linguistiques de l’Union Rromani Internationale ; consultant de plusieurs gouvernements pour l'éducation des Rroms. Biographie et bibliographie de Marcel Courthiade.
Dernier ouvrage publié : Petite histoire du peuple rrom. Première diaspora historique de l’Inde, Paris, Le Bord de l’eau, 2019
Mila Dragović, docteur en traductologie, professeure certifiée de Lettres modernes, membre de PLIDAM
Iovanca Gaspar, doctorante en sociolinguistique, Université Friedrich Schiller, Iéna
Millénaire Rrom : Bilan et perspectives
A l’heure actuelle, où la « question rrom » n’occupe le devant de la scène politique et médiatique européenne que par rapport à la question de l’« intégration », terme élastique mais qui convoie essentiellement une injonction à l’assimilation, il nous semble nécessaire de rétablir la réflexion sur le peuple rrom et sa langue en partant de perspectives moins politisées.Ce colloque a pour but de promouvoir une meilleure connaissance des Rroms et de leur culture, de contribuer à remettre en question certains stéréotypes profonds et récurrents sur ce « peuple sans frontières », dont le ciment n’est ni le territoire matériel, ni la religion et ses dogmes, mais la langue et le sentiment profond d'être spécifiquement Rrom. L’exemple de ce peuple – qui a souffert à travers l’histoire ce qu’il y a de pire : l’exode forcé, l’esclavage et le génocide – a beaucoup à nous enseigner sur la construction des ponts entre les cultures1 et sur la nécessité de donner à tous une éducation en langue maternelle – axe qui fait partie de la vision fondatrice de l'UNESCO –, ou une éducation décente tout court. Il nous interpelle sur de nombreuses questions actuelles dans notre société moderne: le respect des minorités, la diversité, l'intégration sous ses diverses conceptions, le respect mutuel, la tolérance… mais aussi les dévoiements possibles de ces nobles desseins. Ces questions présentent certes une connotation morale et politique, mais nous nous proposons de les aborder d'un point de vue scientifique, présageant de conclusions qui pourront être utiles pour bien d'autres.
Le peuple rrom vient de la moyenne vallée du Gange, en Inde du Nord, même s'il ne s'est constitué en ethnie consciente de sa spécificité qu’en Asie Mineure, où il s’est installé après l’exode forcé de leur berceau Kannauj. Cette ancienne capitale de l’Inde a été pillée en hiver 1018-1019 par le sultan Mahmoud de Ghazni, qui en a déporté presque toute la population, soit « 53.000 hommes, femmes et enfants, pauvres et riches, clairs et sombres de teint, par familles entières ».
A travers des siècles de statut sub-humain qui leur a été infligé, notamment lors du Samudaripen perpétré pendant la Seconde guerre mondiale, les Rroms ont gardé leurs coutumes et leurs valeurs, leur organisation sociale, leur langue et leur musique bien vivantes, ainsi que leur identité et leur dignité.
La langue rromani appartient à la même famille que le sanskrit, dont elle est demeurée particulièrement proche. Sa vitalité à travers les siècles est prouvée par le fait qu’elle est utilisée encore dans le quotidien par environ une moitié des 15 à 20 millions de Rroms à travers le monde, ce qui est un miracle comparé à l’état de fait linguistique d’autres diasporas. Le rromani comporte quatre dialectes, dont l’alphabet commun a été officialisé en 1990. Au-delà d’une littérature orale très riche, une littérature écrite s’est développée depuis les années 1920.
Avec le yiddich et l’arménien occidental, le rromani est une des plus représentatives parmi les langues « sans territoire compact » (il y en a dix en Europe), qui nous offrent une vision du patrimoine et de l’identité bien différente de la notion de territoire. Comme l’écrivait le linguiste Bernard Cerquiglini dans son rapport sur les langues de France, « le vrai territoire d’une langue est la tête de ceux qui la parlent ».
Cette manifestation scientifique sous l’égide de PLIDAM se situe dans la droite ligne du message délivré le 5 novembre 2019 par Mme Audrey Azoulay, directrice générale de l’UNESCO, dont voici un extrait :
« Avec la langue romani – « Romani čhib » – s’offre à l’humanité entière l’archive vivante d’une longue histoire migratoire. Ses 17 dialectes, ses 33000 mots retracent les influences nombreuses et diverses qui l’ont façonnée : aux racines sanskrites et hindi, s’ajoutent des origines persanes, arméniennes, ou encore grecques.
Cette langue ancienne, riche de cette histoire connectée, est aujourd’hui menacée d’extinction. Avec elle, c’est l’identité, la culture et un patrimoine riche en connaissances et en savoir-faire qui sont en péril.
Cette journée mondiale de la langue romani est l’occasion de la mettre en avant, dans sa richesse et dans sa singularité, afin qu’elle soit mieux comprise et protégée au mieux.
Cela passe par son enseignement, en particulier pour les enfants roms dont c’est la langue maternelle car une langue vivante est avant tout une langue qui se pratique au quotidien ; mais cela passe aussi par des politiques ambitieuses pour lutter contre toutes les formes de discrimination et pour soutenir les Roms, leurs droits fondamentaux, leur inclusion sociale et leur développement.
Protéger leur langue, c’est travailler à leur considération ; préserver leur langue, c’est aussi contribuer à un monde dont la polyphonie est un atout. Chaque langue qui disparait est un appauvrissement de notre humanité, un rétrécissement anthropologique contre lequel il convient de lutter de toutes nos forces. »
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