Axes de recherche

Le programme de recherche 2019-2024 poursuit la volonté de transversalité et de transdisciplinarité qui est celle du CREE depuis sa création en 2010, sans pour autant sacrifier son ancrage aréal fort, spécificité majeure du Centre comme de l’Inalco, ainsi que ses perspectives à la fois synchroniques (expertise du monde contemporain) et diachroniques (histoire politique, sociale et culturelle).

La structure formelle du projet est différente de celle du précédent contrat. Cette évolution résulte des synergies désormais solides entre les recherches des différentes sous-aires et met en relief des passerelles disciplinaires patiemment construites depuis la constitution de l’équipe. Le troisième contrat du CREE prend en compte cette nouvelle dimension et substitue aux « axes » disciplinaires du précédent contrat une articulation thématique qui intègre et fait se croiser les trois grands champs de recherche de l’équipe :

  1. Histoire, géopolitique, économie, espaces contemporains ;

  2. Littératures, arts, cultures ;

  3. Langues et société, linguistique, développement numérique.

Ces trois grands champs, qui reprennent les trois « axes » du précédent quinquennal, se déclinent désormais en six axes. Aussi ce nouveau programme s’appuie-t-il sur une légère évolution de la structure générale en intégrant pour l’essentiel les grandes disciplines représentées dans le centre dans des axes de recherche transversaux.
 
Le programme 2019-2029 combine trois types de projets :

  • La poursuite de projets collectifs ambitieux et inscrits dans le temps long : chacun des axes inclut des projets de longue durée et ayant structuré le quinquennal précédent. Ils sont approfondis et le plus souvent enrichis de nouvelles dimensions apparues nécessaires en l’état de la recherche.

  • L’évolution de problématiques prolongées dans de nouvelles perspectives ; ce type de projets s’appuie sur des évolutions de projets antérieurs ou de la recherche de synergies thématiques à vocation aréale. Il concerne principalement le champ SHS abordé de manière transversale par trois grandes thématiques : « Patrimoines et héritages », « Sociétés impériales, post-impériales et post-soviétiques », « Crises et conflits modernes et contemporains » qui ont vocation à embrasser de la fin du xixe siècle à la période contemporaine l’ensemble des aires couvertes en combinant la richesse disciplinaire des membres de l’équipe (historiens, historiens de la littérature, géographes, politistes et géopolitistes, économistes notamment).

  • Des projets nouveaux qui s’appuient sur des recherches antérieures, participent de la même dynamique à la fois aréale et pluridisciplinaire  et s’inscrivent, dans chacun des axes, dans le champ des études d’histoire culturelle et d’histoire sociale. 

Le projet se donne pour ambition de poursuivre et d’amplifier le travail de valorisation et  de contacts entre le monde scientifique et la cité (les « Petits déjeuners de l’Observatoire des États postsoviétiques », les « Journées finno-ougriennes » ou la « Veille médiatique Ukraine »). Il apporte un soin particulier à la poursuite de l’intégration des doctorants et post-doctorants au niveau des responsabilités de projets ou de sous-projets.
 
Sur le plan quantitatif, l’ensemble est constitué de 25 projets (dont 9 se déclinent en sous-projets) portés par 31 membres titulaires, associés, doctorants et docteurs du CREE. Chaque axe associe des collègues du CREE et d’autres centres de recherche de l’Inalco ainsi que d’autres établissements et centres de recherche français et étrangers dans les champs pertinents. Conformément à sa vocation internationale, le CREE continuera à s’appuyer sur un réseau dense et éprouvé de partenaires universitaires et académiques européens, y compris au-delà des espaces étudiés.

​AXE 1 – Patrimoines et héritages

Responsable : Catherine Servant (CREE)

L’axe « Patrimoines et héritages » propose des approches croisées et complémentaires des héritages culturels et poursuit une réflexion sur leur dimension patrimoniale. Il combine les cultures populaires et savantes dans leurs dimensions à la fois matérielles et immatérielles. Histoire, histoire culturelle, architecture et littérature en forment les piliers disciplinaires.
Cet axe s‘est construit en partie sur les acquis de deux projets issus du précédent quinquennal – Thème A. Nation, nationalités, questions nationales –, dont il renouvelle également les approches et les objets.
  • Le projet 1.1 reprend plusieurs réalisations de recherche des années 2014-2018, fruit d’une réflexion bien engagée sur l’articulation presse-nation(s) aux XIXe et XXe siècles, en proposant un thème spécifiquement consacré au texte de presse en Europe médiane.
  • De même, le projet 1.2 prolonge une recherche autour du patrimoine dans les espaces post-soviétiques amplement balisée lors du précédent contrat de recherche, en l’enrichissant de nouvelles directions de recherche.
  • Le projet 1.3 introduit un traitement plus spécifiquement littéraire et contemporain des héritages du XXe siècle – et antérieurs – en se proposant d’étudier le « traitement non-nostalgique » du passé dans le roman européen contemporain.
  • Le projet 1.4 s’intéresse à un héritage culturel moins étudié pour l’Europe médiane, celui des jeux de société, dont il s’agira d’explorer, dans le temps long, l'histoire, l'évolution et la symbolique, et qui sera étudié en liaison avec la création littéraire.
  • Le projet 1.5 porte que les éditeurs et les circulations internationales des publications depuis 1990. Il peut être envisagé en collaboration avec les projets 6.1 et 6.2 de l'axe 6. 
 
Les chercheurs animant cet axe, le plus souvent associés eux-mêmes à d’autres travaux de recherches du présent programme, serviront naturellement de points de jonction entre ces projets et certaines thématiques intégrées à d’autres axes. À titre d’exemple, des rapprochements, voire des investigations combinatoires peuvent être attendus entre le projet sur le « traitement non-nostalgique du passé dans le roman européen contemporain » et le projet 6.2 « Penser autrement l’histoire littéraire ».
 
Projets :
  • Projet 1.1. L’Europe médiane dans l’espace francophone à travers le texte de presse : corpus, circulations, représentations (Nicolas Pitsos, Catherine Servant)
  • Projet 1.2. Le patrimoine dans les espaces post-soviétiques (Julie Deschepper, Taline Ter Minassian, Sophie Hohmann)
  • Projet 1.3. Le traitement « non nostalgique » du passé dans le roman européen contemporain (Piotr Bilos)
  • Projet 1.4. Littérature et jeux de société en Europe médiane (András Kanyadi, Piotr Bilos)
  • Projet 1.5. Éditeurs et circulations internationales des publications depuis 1990 (Anne Madelain)

Projet 1.1. L’Europe médiane dans l’espace francophone À travers le texte de presse : corpus, circulations, représentations (du XIXe au milieu du XXe siècle)

Responsables Catherine Servant (CREE) et Nicolas Pitsos (CREE)
 

Élément constitutif de la construction des savoirs sur l’ici et l’ailleurs, relais de diffusion de connaissances ou vecteur de promotion d’intérêts politiques, économiques, culturels, la presse est susceptible de nous aider à mieux reconstituer la diversité sociale et culturelle des sociétés concernées, tout en nous renseignant sur des processus d’importation/exportation d’images et de perception de soi et de l’autre. Une place particulière est occupée au sein de ce corpus par la presse allophone, autrement dit, les journaux et périodiques publiés dans des langues autres que celles établies/reconnues comme officielles et/ou minoritaires dans l’espace où ils voient le jour.
En se donnant pour horizon chronologique un « très long XIXe siècle » déployé jusqu’à l’entre-deux-guerres, ce projet vise tout d’abord à l’établissement d’un corpus, avec un double objectif significatif des dynamiques circulatoires à l’œuvre dans la presse :
- D’un côté, il s’agira de recenser et répertorier les journaux et périodiques rédigés dans une langue des pays d’Europe médiane et publiés dans les pays francophones européens ;
- De l’autre, de repérer et d’inventorier la présence de l’Europe médiane dans la presse francophone à différentes échelles (articles, informations, recensions, simples échos).
Par ailleurs, il est à noter que cet inventaire poursuit aussi un objectif de conservation, nombre des supports concernés se trouvant aujourd’hui dans un état de dégradation plus ou moins avancé.
Parmi les orientations de recherche rendues possibles par l’établissement de ce corpus, il faut évoquer en premier lieu une enquête informative et prosopographique sur la présence de l’Europe médiane dans l’espace francophone à travers le texte de presse, visant à la constitution d’une base de données : types de publications, personnes qui les ont initiées ou ont eu une fonction de médiateur, réseaux qui les ont portées, relations inter-revues, informations sur le lectorat. Ensuite, l’analyse des contenus de ces publications conduira à une série de questionnements : rôle de ces organes dans le mouvement général de circulation des personnes et des idées, transferts culturels auxquels ils ont donné lieu, identités métissées qui en ressortent, stratégies de leurs acteurs dans la promotion de prérogatives idéologiques et esthétiques, la construction des savoirs, la « diplomatie culturelle », la re-production d’images stéréotypées tant sur les nations puis États de l’Europe médiane que sur les pays francophones européens.
 
Chercheurs associés au projet : Étienne Boisserie (CREE), Joëlle Dalègre (CREE), Iryna Dmytrychyn (CREE), Bénédicte Deschamps (Université Paris-Diderot / Transfopress), Diane Cooper-Richet (CHCSC, Université de Versailles St-Quentin-en-Yvelines / Transfopress), Cécile Folschweiller (CREE), Bernard Lory (CREE), Alisa Menshykova (doctorante, UMR CERCEC-EHESS), Stéphanie Prévost (Université Paris-Diderot), Isabelle Richet (Université Paris-Diderot / Transfopress), Pierre Sintès (TELEMMe, Université d’Aix-Marseille), Ilona Sinzelle-Poňavičová (doctorante CREE).
 
Principales collaborations : réseau Transfopress (Réseau transnational pour l’étude de la presse en langues étrangères), Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines (CHCSC) de l’Université Versailles St-Quentin, GDR « Connaissance de l’Europe médiane » (CNRS n° 3607), UMR Eur’Orbem, Académie tchèque des sciences (Institut littéraire).
 
Opérations de recherche envisagées :

  • un séminaire doctoral et de recherche ;
  • un colloque international sanctionné par une publication ;
  • organisation de tables rondes en collaboration avec les centres culturels français dans les pays d’Europe médiane et les centres culturels des pays d’Europe médiane en France, avec comme objectif la diffusion des résultats des travaux de recherche menés dans le cadre du projet ;
  • initiation d’une base de données accessible via un site internet
Mots-clefs : thématique interdisciplinaire et transnationale ; littérature et histoire ; histoire culturelle ; médiations et transferts culturels ; importation et exportation des savoirs entre la France (la francophonie) et l’Europe médiane ; XIXe siècle et entre-deux-guerres ; diplomatie culturelle. 

Projet 1.2. Le patrimoine dans les espaces post-soviétiques

Responsables : Julie Deschepper (CREE), Taline Ter Minassian (CREE), Sophie Hohmann (CREE)

1.2.1. Patrimoines et politiques mémorielles

Adossé au séminaire de M2 de l’Inalco, cet axe de recherche est proposé en partenariat avec l’Université Paris-Diderot, master Ville, Architecture, Patrimoine. Une piste de partenariat est tracée (Sophie Coeuré, Paris-Diderot) selon les lignes déjà expérimentées depuis plusieurs années. Ce sous-axe intègre toutes les recherches ayant trait à l’histoire, la politique, la sociologie, l’économie et l’anthropologie du patrimoine dans différentes aires géographiques, y compris dans sa composante naturelle et environnementale.

1.2.2. Le patrimoine soviétique, russe et néo-russe à Paris

Nous avons l’intention d’explorer dans ce domaine (déjà balisé) plusieurs pistes de recherches portant sur l’histoire et l’actualité du patrimoine russe à Paris. Parmi les objets de recherche, citons le patrimoine néo-russe (Centre spirituel orthodoxe de Paris) traité dans ses dimensions architecturales et politiques (Soft Power russe). Nous avons également à l’esprit le patrimoine russe dans le métro parisien (politique d’échanges artistiques entre le métro de Paris et le métro de Moscou). Ce projet d’étude trouvera un prolongement dans le sous-axe III car le patrimoine soviétique du métro de Moscou est un objet patrimonial soviétique à part entière. Nous tenterons une analyse des restaurations menées dans certaines stations moscovites en mobilisant, outre l’histoire de l’art et de l’architecture, d’autres disciplines, en particulier l’anthropologie du patrimoine.

1.2.3. Architecture et patrimoine dans les États post-soviétiques : de la patrimonialisation à la « dépatrimonialisation » ?

Outre l’histoire, la sociologie et l’économie du patrimoine, nous expérimenterons des nouvelles approches du terrain soviétique, notamment l’archéologie dans les milieux extrêmes (archéologie glaciaire, permafrost etc.). [exemple du monastère d’Ostachkov sur le lac Seliger : lieu d’enfermement d’une partie des officiers polonais assassinés en 1940 dans le cadre des « massacres de Katyn »]

Chercheurs associés au projet : Sophie Coeuré (Université Paris-Diderot), Delphine Betchel (Sorbonne Université), François Gentili (INRAP), William Van Andringa (Université Lille-III), Claire Thouvenot (HAR), Louisa Martin Chevalier (MUSIDANSE), Emeric Tellier (IHS).

Principales collaborations :
 Université Paris-Diderot, Sorbonne Université, INRAP, EHESS, Université Lille-III, Université Paris-VIII, Nanterre Université, LabEx H2H, IHS, Musée d’archéologie du Val d’Oise.

Opérations de recherche envisagées :

  • Petits déjeuners de l’Observatoire des États-post soviétiques ;
  • Séminaires de recherche : Taline Ter Minassian « Patrimoines et politiques mémorielles ».
Julie Deschepper : séminaire de recherche spécialisé dans le patrimoine dans les États socialistes et post-soviétiques. Taline Ter Minassian et Sophie Hohmmann : Séminaire et recherches sur le terrain post-soviétique. Julie Deschepper, Claire Thouvenot, Louisa Martin Chevalier : « Les avant-gardes artistiques soviétiques et contemporaines ») ;
  • Publications : Publication des actes du colloque « Peut-on écrire une histoire française du patrimoine soviétique ? » aux Presses Universitaires de Rennes. Catalogue d’exposition « La naissance d’un patrimoine soviétique en France » qui a eu lieu dans la Galerie de l’Inalco.
 Publication et la traduction en russe et en arménien de l’ouvrage de Taline TER MINASSIAN L’Architecture au Goulag, Norilsk, Histoire caucasienne d’une ville polaire soviétique (éditions B2). Monographie urbaine complète de Norilsk « Norilsk, cité du nickel et du palladium » par Taline TER MINASSIAN et Sophie HOHMANN. Publication d’un recueil de textes inédits sur la musique et l’architecture d’avant-garde. Avec Louisa Martin Chevalier et Claire Thouvenot. 

Mots-clefs : espaces post-soviétiques ; histoire transnationale ; patrimoine soviétique ; études patrimoniales, patrimonialisation ; Norilsk ; patrimoine soviétique en France ; ville, urbanisme ; architecture, archéologie.
 

1.2.4. Patrimonialisation de la nature et construction des territoires : le cas de la Volga

Les politiques de protection de la nature en Union soviétique ont connu un tournant dans les années 1960 et 1970 avec l’affirmation de la dimension patrimoniale des paysages et des écosystèmes. Il s’agit d’envisager cette évolution, qu’accompagne un renouveau du sentiment national russe mais aussi des identités régionales en Russie, à la fin de la période soviétique et dans les dernières années du XXe siècle, par une approche à la fois historique et anthropologique. 

Principales collaborations : EHESS, Université de Tver 

Projet 1.3. Le traitement « non nostalgique » du passé dans les arts en Europe centrale et ailleurs

Responsable : Piotr Bilos (CREE)
 
Dans son œuvre romanesque à caractère autobiographique, Karl Ove Knausgaard affirme : « En tout état de cause, on ne peut pas revenir en arrière, ce que nous avons fait est irréparable et en regardant derrière soi, ce n’est pas la vie qu’on voit mais la mort. » Sur un plan apparemment inverse, Søren Kierkegaard avait conféré une dimension philosophique à la notion de « reprise » d’un événement passé, vécu jadis et aujourd’hui repris, qu’il distingue de l’espérance (tournée vers un avenir encore indécis) et du ressouvenir qui consiste en une tentative de rendre à la vie ce qui s’avère inéluctablement périmé.
Si les rythmes des transformations sociales et politiques et ceux de la vie littéraire ne se superposent pas, il n’en reste pas moins que des transformations structurelles aussi importantes que celles advenues aux ex-pays de l’Est, situés jadis dans l’orbite de URSS, mais aussi, en vertu du ricochet structurel suscité, à l’ensemble de l’Europe, laquelle voit son architecture reconfigurée, ont eu des incidences majeures sur le champ littéraire, aussi bien en Europe centrale qu’en Europe de l’Ouest. Dans cette perspective, les opérations de recherche auront pour objectif de scruter le développement des littératures européennes en tant qu’elles auront été influencées par « le choc de 1989 » et le processus de transformation des pays d’Europe centrale et orientale, quelle que soit la diversité des situations locales et particulières. 
Que faut-il entendre par l’expression « traitement non-nostalgique » du passé ? À l’époque de la division de l’Europe et du rideau de fer, l’approche nostalgique avait pu susciter beaucoup de vocations. Mais qu’en est-il du rapport au passé à une époque où l’Europe se libère du diktat de puissances étrangères et où la vie socio-politique fait l’objet d’une libre détermination ? Ce qui nous intéresse, c’est la mise en lumière des différents modes du traitement non nostalgique, à commencer par l’attitude critique qui, même lorsqu’elle parle de défaites passées, propose d’en tirer les leçons, mais cela peut être bien autre chose, par exemple la tentative de (re)lire le passé par-delà le schématisme d’une vision binaire distinguant le positif (passé) opposé au négatif (présent). On se demandera ainsi en quoi la mode du « rétro » tourné vers la période communiste, perceptible au cinéma notamment (certains parlent de « rétromanie ») s’écarte d’une approche simplement nostalgique. Plus largement, il s’agira de se demander quelles visées poursuit l’Europe lorsqu’elle convoque le passé sur la scène de ses représentations. Il s’agira également de se demander quels sont les filtres, les relais et médiateurs formels dont se servent les auteurs pour conférer à leurs représentations un aspect fictionnel, esthétique et philosophique relevant de l’invention artistique. 
 
Chercheurs associés au projet : Justyna Hanna Budzik (Département d’études cinématographiques et des médias, Université de Silésie de Katowice), Iryna Dmytrychyn (CREE), Agnieszka Kaczmarek, (Institut d’études culturelles de l’université Adam Mickiewicz de Poznań), András Kanyadi (CREE), Charlotte Krauss (Fondation Alexander von Humboldt, Université d'Etat de Saint-Pétersbourg), Hélène Martinelli (Département Lettres et Arts, Institut d’histoire des représentations et des idées dans les modernités, ENS de Lyon), Guillaume Métayer (CELLF, CNRS-Paris-Sorbonne), Marzena Karwowska (Département de littérature polonaise des XXe et XXIe siècles, Université de Łódź), Jakub Kornhauser (Centre d’Études sur les avant-gardes de l’Université de Cracovie) Tomasz Wójcik (Département d’études littéraires du XXe siècle de l’Université de Varsovie).
 
Principales collaborations : Instituts culturels d’Europe centrale à Paris (tchèque, polonais, hongrois, autrichien), Maison de l’Europe (Paris), Centre d’Études sur les cultures de la mémoire de Cracovie, Conseil régional d'Île-de-France, mairie du XIIIe arrondissement de Paris, BNF, CNL, Actes Sud, Académie polonaise des sciences (PAN).
 
Opérations de recherche envisagées :

  • Un colloque international ;
  • Organisation de tables rondes en collaboration avec les instituts culturels des pays d’Europe centrale et autres à Paris avec pour objectif la diffusion des travaux et la mise en place d’un réseau actif de réflexion en France autour de ces questions ;
  • Création d’un site Internet. 

Mots-clefs : Thématique interdisciplinaire et transnationale ; Littérature et histoire ; contemporanéité ; constitution du sujet ; changement de paradigme ; « temps long » ; « république des lettres ».
 

Projet 1.4. Littérature et jeux de société en Europe médiane

Responsables : András Kanyadi (CREE), Piotr Bilos (CREE) 
 
Entre agôn et aléa, les jeux de société fascinent depuis toujours l'imaginaire et ne cessent d'alimenter la création littéraire et artistique. Si les représentations artistiques du tarot et du jeu d'échecs sont aujourd'hui mondialement connues, c'est surtout grâce à des auteurs du canon occidental. Pourtant, l'Europe médiane a aussi considérablement enrichi ce patrimoine universel. 
Ouvert aux spécialistes de littérature et de civilisation, notre projet cherche à étudier les différentes formes d'articulation des jeux de société dans ce vaste espace culturel qui s'étend de la Baltique aux Balkans. Il s'agira d'explorer, à partir de l'époque moderne et jusqu'à nos jours, l'histoire, l'évolution et la symbolique des échecs, des cartes et des jeux de tables, à travers les différentes cultures « médianes » enseignées à l'Inalco. Le pouvoir de représentation protéiforme de ces jeux – cosmologique, politique, militaire, érotique – constitue une source intarissable pour la littérature ; dès lors, il faudra se pencher sur ses nombreux aspects narratologiques, stylistiques, rhétoriques, mythocritiques et intertextuels élaborés au fil du temps par l'entremise d'une grande diversité générique. Les études culturelles, en particulier leur approche transversale et transmédiale, et l'histoire des idées occuperont une place de choix dans la recherche. De même, il pourra être intéressant d’étudier comment les œuvres littéraires connaissent des extensions sous l’aspect de jeux de société, en particulier dans un monde où la dissémination des formes revêt une dimension industrielle. Les enjeux artistiques et philosophiques peuvent-ils alors être sauvegardés par rapport à ceux plus directement ludiques ? Quels types d’interaction entre les supports sont-ils possibles ?
Outre les colloques thématiques et la consolidation d'un réseau de chercheurs internationaux, l'objectif majeur du projet réside dans l'édition de deux anthologies de nouvelles traduites en français, permettant la circulation de ces textes dans le monde francophone.

Chercheurs associés au projet : Jacques Berchtold (Fondation Bodmer), Matteo Colombi (GWZO), Emese Egyed (Université Babeș-Bolyai de Cluj), Sándor Kálai (Université de Debrecen), Stephan Krause (GWZO), Aleksandra Mochocka (Université de Casimir le Grand de Bydgoszcz), Guillaume Métayer (CNRS), Andrea Seidler (Université de Vienne), Zoltán Z. Varga (Académie hongroise des sciences).

Principales collaborations : Leibniz-Institut für Geschichte und Kultur des östlichen Europa (GWZO, Leipzig), Académie hongroise des sciences (Institut littéraire), Institut für Europäische und Vergleichende Sprach- und  Literaturwissenschaft (EVSL, Université de Vienne), Université Babeș-Bolyai, Université de Debrecen, Académie polonaise des sciences, Institut polonais de Paris.
 
Opérations de recherche envisagées :

  • Trois colloques thématiques internationaux avec publication ;
  • Un séminaire de Master 1-2 ;
  • Deux anthologies de nouvelles regroupant un corpus issu des dix-sept langues enseignées dans notre département ECO.  

Mots-clefs : études culturelles ; thématologie ; Europe médiane ; littérature comparée ; histoire des idées ; thématique interdisciplinaire et transnationale. 
 

Projet 1.5. Éditeurs et circulations internationales des publications depuis 1990

Responsable : Anne Madelain (CREE)
 
L’édition comme processus de production et de diffusion d’œuvres et de savoirs est entrée dans une profonde mutation depuis le début des années 1990 avec la révolution informatique et numérique qui a affecté autant les pratiques que les instances de légitimation et l’économie du secteur. Cette mutation a coïncidé en Europe médiane avec l’effondrement des régimes communistes et à la réorganisation complète du secteur de l’édition, hors du contrôle de l’État. Le projet comportera deux volets : 
 

1.5.1. Le monde de l’édition dans les espaces postsocialistes contemporains 


Commencé en 2018 dans le cadre du PHC Pavle Savić(Sorbonne Universités/Institut d’études politiques de Belgrade), ce premier volet s’organise autour d’une enquête sur le monde professionnel du livre dans les États successeurs de la Yougoslavie dont il s’agit d’analyser les évolutions après l’éclatement de la fédération (1991) et de les inscrire dans une sociohistoire du champ culturel. Ce projet ambitionne d’initier un travail comparatif et collectif avec des chercheurs travaillant sur ces objets dans d’autres espaces postsocialistes (en particulier l’espace post-soviétique et post-tchécoslovaque) et des territoires ayant traversé par certains points des mutations comparables, comme le monde arabe.
 

1.5.2.  Éditer des traductions en sciences humaines et sociales

 
Le second volet du projet fait suite au séminaire de recherche mené entre 2016 et 2019 à l’EHESS « Penser en plusieurs langues. Éditer des traductions en sciences humaines et sociales aujourd’hui ». Il s’agit d’animer une réflexion collective et comparative sur l’édition des traductions en sciences humaines et sociales en faisant appel à des chercheurs spécialistes de différentes aires culturelles, des éditeurs scientifiques et des traducteurs. En partant de l’idée que la traduction est productrice de savoirs, nous questionnons l’influence de la traduction sur l’émergence de nouvelles connaissances et sur la révision des connaissances existantes.
Dans les deux composantes il s’agit d’alimenter, par l’entrée par l’Europe médiane et les contextes postsocialistes, l’analyse plus générale. Cette partie du projet dialoguera avec l’axe 6 du programme quadriennal du CREE.

Chercheurs associés:
Marc Aymes (CETOBaC, EHESS-CNRS), Daniel Baric (Eur’Orbem, Sorbonne université), Ivan Čolović(Biblioteka XX vek), Franziska Humphreys (Centre Georges Simmel, EHESS), Catherine Horel (SIRICE, CNRS), Claire Madl (CEFRES), Bella Ostromooukhova(Eur’Orbem, Sorbonne université), Séverine Sofio (projet Transiens, revue Biens symboliques), Nisrine al-Zahre (CeSor, EHESS).
Principaux partenaires institutionnels EHESS (CETOBaC, CERCEC, Centre Georges Simmel et Editions), Sorbonne université et Institut d’études politiques de Belgrade (Partenariat Hubert Curien PHC Pavle Savic), Université de Vincennes (projet Transiens), GDR connaissance de l’Europe médiane (CNRS n° 3607), Kulturtreger (Zagreb), CEFRES (Prague), Bureau international de l’édition française, BULAC.

Réalisations attendues:
- un atelier du GDR Europe médiane   (février 2020)
- un colloque international « Penser en plusieurs langues. Éditer des traductions en sciences humaines et sociales » en 2020 débouchant sur une publication
- une journée d’études internationale en vue de constituer un réseau de recherche sur l’édition dans les pays postsocialistes (2021)
- un volume collectif sur l’édition dans les espaces postsocialistes
- plusieurs articles dans des revues et volumes collectifs 
- plusieurs tables rondes en partenariat avec la BULAC
- invitation d’acteurs du monde du livre dans le cadre de séminaires de recherche à l’INALCO et l’EHESS.

Mots-clefs:
Traduction, édition, circulation, transferts culturels, langues et sciences sociales, monde professionnel du livre, espace post-yougoslave, espace postsocialistes
 

AXE 2 – Sociétés impériales, post-impériales et post-soviétiques

Responsable : Julien Vercueil

Les projets de l’axe « Sociétés impériales, post-impériales et post-soviétiques » recourent à l’histoire, à la science politique et à l’analyse économique pour proposer des approches problématisées de transformations récentes ou actuelles de l’Europe médiane et de l’Europe orientale.
Deux grandes orientations structurent cet axe :

  • « D’une part, des approches historiques qui s’intéressent aux mouvements de population – migrations liées aux conflits, aux déplacements forcés, qui interagissent avec certaines politiques migratoires de pays occidentaux –,à la notion de réfugié au premier xxe siècle (2.4) et aux transformations urbaines conséquentes (2.3), aux recompositions socio-politiques de la période communiste (2.5), en Europe centrale, mais aussi poursuivre l’examen des changements économiques et institutionnels intervenus dans la région depuis l’effondrement du bloc socialiste (2.6)   ;
  • D’autre part, l’analyse de transformations socio-politiques et économiques majeures qui semblent s’accélérer aujourd’hui en Europe centrale et orientale et en Eurasie : les évolutions contemporaines et actuelles de l’espace baltique sont étudiées dans une approche qui privilégie les circulations et transferts des idées, des savoirs et des hommes, les transformations urbaines de l’époque soviétique et les populismes actuels (2.3) ; l’examen du rôle politique et géopolitique actuel de la Russie, notamment au travers des représentations que ses élites politiques entendent projeter vers l’extérieur (2.2) ; l’analyse des inflexions de la trajectoire économique de la Russie, affectée notamment  par les sanctions et contre-sanctions, et leurs effets sur l’ensemble de l’espace post-soviétique (2.1.)  ; ainsi qu’une étude de l’évolution actuelle des élites politiques en Europe centrale et orientale, intégrant notamment – mais pas seulement – l’influence de la Russie (2.5). »

Les travaux issus de cet axe viendront compléter ceux d’autres axes du CREE et, dans une certaine mesure, se combiner à eux. C’est le cas par exemple de l’axe « Crises et conflits », projets 3.2. et 3.4. -, auquel participent plusieurs chercheurs de notre axe. C’est aussi le cas de l’axe « Patrimoines et héritages » – notamment les projets 1.1 et 1.2.

Projets : 

  • Projet 2.1. Les économies dans l’espace post-soviétique (Julien Vercueil)
  • Projet 2.2. La Russie et le monde : nouvelles perspectives (Anne de Tinguy)
  • Projet 2.3. Les espaces baltiques (Katerina Kesa, Eric Le Bourhis)
  • Projet 2.4. Mobilités, migrations, transferts (Etienne Boisserie, Alisa Menshykova)
  • Projet 2.5. Histoire sociale du politique des périodes communiste et postcommuniste en Europe centrale et orientale : élites nationales, influences transnationales (Irina Gridan)
  • Projet 2.6. Des réformes aux transformations économiques et sociales dans les pays d’Europe centrale et orientale (Assen Slim, Julien Vercueil)

Projet 2.1. Les économies dans l’espace post-soviétiques


Responsable : Julien Vercueil
 
Ce projet entend poursuivre l’analyse menée depuis 2011 des trajectoires des économies de l’espace post-soviétique, en particulier la Russie.

Un contexte nouveau a été créé dans la région par les sanctions et contre-sanctions économiques et technologiques (2014-2018). C’est particulièrement le cas en Russie : comparativement à sa formulation initiale en 2007, la « stratégie 2020 » a connu des inflexions importantes, comme en témoignent les évolutions de la politique économique (conjoncturelle comme structurelle). Les relations économiques et politiques de la Russie avec son voisinage, également.

L’objet principal de ce projet est d’étudier les conséquences de ces changements sur les interactions socio-économiques dans l’espace post soviétique, sous le double aspect des politiques publiques et des stratégies privées. À titre d’illustration et sans prétendre décrire ici l'ensemble des thématiques pouvant être couvertes, la relation problématique entre l’intégration institutionnelle formelle et l’intégration économique concrète sur le terrain, ainsi que les relations énergétiques entre la Russie et les pays d’Europe centrale et orientale, qui ont déjà été l’objet d’analyses durant le précédent quadriennal, continueront d’être suivis et analysés. Nous y ajouterons une dimension liée aux réactions observées dans les pays de la région aux projets de développement d’infrastructures portés par la Chine dans le cadre des Nouvelles Routes de la Soie.

Chercheurs associés au projet : Arman Ahunbaev (Strategic and Industrial Research Department, Eurasian Development Bank, Almaty), Eléonore Nantas (doctorante CREE), Roman Medvedev (doctorant CREE), Anton Kravtchenko (doctorant CREE), David Teurtrie (CUF Saint Pétersbourg et CREE), Céline Bayou (chercheure associée CREE), Pascal Grouiez (Ladyss, Université Paris-Diderot), Jean Radvanyi (CREE), Michele Brunelli (Université de Bergamo), Xavier Richet (EA « Intégration et Coopération dans l’Espace Européen », ICEE, Université Sorbonne nouvelle), Philippe Cadène (Ladyss, Université Paris-Diderot), Nikolay Nenovsky (CRIISEA, Université de Picardie), Dimitri Kouvaline (Institut de prévision économique nationale, Académie des sciences de Russie, Moscou), Alexander Schirov (Institut de prévision économique nationale, Académie des sciences de Russie, Moscou), Alexander Bouzgaline (Université Lomonossov, Moscou), Eric Magnin (Ladyss, Université Paris-Diderot), Petia Koleva (Ladyss, Université Paris-Diderot), Nathalie Rodet-Kroichvili (RECITS, Université de technologie de Belfort-Montbéliard), Jean-François Huchet (ASIEs, Inalco), Sophie Hohman (CREE), Assen Slim (CREE). 
 
Principales Coopérations : LADYSS (UdP-Paris X), Université d’état de Moscou, Institut de prévision économique nationale de l’Académie des Sciences de Russie. Le séminaire BRICS porté désormais par l’INALCO en collaboration avec l’EHESS-FMSH (http://brics.hypotheses.org/), est organisé dans le cadre du CREE et ouvert aux étudiants de Master et doctorat de l’INALCO, de l’EHESS et de l’UdP.
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Projet d’ouvrage sur les structures des capitalismes post-soviétiques ;
  • Séminaires fermés et journées d’études ouvertes ;
  • Association du séminaire régulier de recherche « BRICs » (FMSH-EHESS) aux activités du CREE ;
  • Contributions individuelles et collectives à des colloques internationaux (France, Russie, notamment), avec l’objectif de déboucher sur leur publication sous forme d’articles dans des numéros spéciaux de revues académiques ou d’ouvrages collectifs ;
  • Articles de recherche dans les revues référencées HCERES. 
Mots clés : Institutions économiques régionales ; intégration économique régionale ; sanctions internationales ; trajectoires macroéconomiques et politiques publiques.
 

Projet 2.2. La Russie et le monde : nouvelles perspectives 


Responsable : Anne de Tinguy (CREE)

Ce projet, qui se propose d’étudier le rapport de la Russie au monde extérieur depuis la crise ukrainienne de 2014 et la guerre en Syrie. Il porte sur :

2.2.1. Les perceptions et les représentations de la Russie dans le monde - leur impact  sur les relations internationales 

Les perceptions et les représentations ne sont certes pas les seuls facteurs structurants des stratégies internationales définies par les États, mais elles jouent un rôle essentiel. L’objet de la recherche est d’étudier le cas de la Russie. Il est de se pencher sur les stratégies définies  par Moscou pour modeler l’image qu’elle renvoie d’elle-même et de questionner l’impact des politiques menées. Il est de s’interroger sur les corrélations entre les regards que l’étranger porte sur la Russie, la place telle qu’elle « est véritablement » de celle-ci dans le monde et les représentations que les Russes ont de la position de leur pays dans le système international. Cette recherche se situe dans le prolongement d’une première étude qui portait sur l’espace postsoviétique. Fruit d’un travail collectif mené au sein d’un groupe de recherche que j’avais mis en place dans le cadre du CREE, elle avait débouché sur une publication dans Anatoli – Territoires, politique et sociétés (CNRS Editions, 2011).

2.2.2. La politique de la Russie et les (re)configurations internationales dans l’espace postsoviétique

Depuis 1991, les reconfigurations de l’espace postsoviétique sont aussi fortes que complexes. Cette région n’est plus un espace unifié, centralisé et fermé. L’annexion en 2014 de la Crimée, suivie de l’intervention russe dans le Donbass, a provoqué une rupture entre la Russie et l’Ukraine qui est le coup le plus grave porté depuis 1991 à sa cohésion. Ces événements ont eu d’autres répercussions qui ont profondément modifié le rapport de la Russie et de l’Ukraine au monde extérieur.  L’objet de la recherche est de tenter d’identifier et de comprendre les grands facteurs structurants des évolutions en cours, les nouveaux paradigmes en cours de définition et les recompositions qui s’opèrent. La stratégie définie par la Russie, qui reste un acteur régional majeur, ainsi que les outils qu’elle met au service de sa politique dans cette zone, sont au cœur de cette recherche qui accorde également une attention particulière aux évolutions et aux mutations de l’Ukraine.
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Organisation d’un ou de plusieurs séminaires pourrait marquer les avancées de ces recherches ;
  • Organisation de séminaires doctoraux.

 

Projet 2.3. Les espaces baltiques

Responsables : Katerina Kesa (CREE), Eric Le Bourhis (CREE)
 
La région de la mer Baltique se trouve à cheval sur plusieurs aires culturelles (Europe médiane, Europe du Nord, monde germanique, monde russe) qui sont fortement ancrées dans les traditions de recherche en sciences humaines. Toutefois, en dépit des frontières (religieuses, culturelles, politiques, idéologiques) qui ont traversé et traversent cette région, la mer est un facteur évident de contact et de rapprochement.  Ce projet ne vise pas à créer une nouvelle aire culturelle mais questionne l’unité et l’hétérogénéité des sociétés qui bordent la mer Baltique. Il s’agit d’un projet pluridisciplinaire, qui se veut un cadre pour l’interaction entre différentes disciplines (géographie, histoire, littérature, science politique…) sur une aire géographique aux contours laissés volontairement flous (recoupant des régions des pays suivants : Allemagne, Biélorussie, Danemark, Estonie, Finlande, Lettonie, Lituanie, Norvège, Pologne, Russie, Suède). Ce projet porte sur les époques contemporaines et actuelles (xixe- xxie siècles), période de disparition et d’apparition d’empires, au cours de laquelle les frontières politiques qui divisent cette région n’ont cessé de changer.
Le projet « Les espaces baltiques » s’articule autour de trois sous-projets :

2.3.1. Définir les espaces baltiques

Responsable : Antoine Chalvin, Katerina Kesa, Eric Le Bourhis (CREE)

Ce projet entreprend de définir les espaces baltiques par les relations et déplacements qui relient leurs territoires, leurs acteurs politiques et leurs habitants, entre eux et avec le reste de l’Europe et du monde. Il est pluridisciplinaire et confronte des travaux en cours relevant de disciplines principales de l’axe 2 (histoire, science politique, économie) mais également de la géographie, de la littérature et de la sociologie. Sont privilégiés les travaux portant sur l’étude des réseaux, transferts, circulations, migrations, etc. Créé en 2016, ce projet prolonge le séminaire de recherche « Autour de la Baltique » organisé à Sciences Po-CERI entre 2013 et 2015.

Chercheurs associés : Nicolas Escach (Sciences-Po Rennes, Caen) ; Arnaud Serry (Université du Havre) ; Barbara Kunz (CERFA/IFRI) ; Céline Marangé (IRSEM) ; Amélie Zima (IRSEM/CERCEC) ; Fredrik Lars Stöcker (Institut für Osteuropäische Geschichte, Universtät Wien) ; Andris Sprūds (directeur du Latvian Institute of International Affairs), Laurent Coumel (INALCO/CREE), Elena Kochetkova (HSE, Saint-Pétersbourg), Irina Tcherneva (CERCEC), Harri Veivo (Université de Caen), Vincent Dautancourt (Université de Tartu), Juliette Denis (CERCEC) ; Yoann Aucante (CESPRA-EHESS), Una Bergmane (The London School of Economics and Political Science), Julien Gueslin (La contemporaine).

Principales collaborations : Sciences-Po Rennes, Campus de Caen – Pôle Europe du Nord, UMR/Idées - Université du Havre, IRSEM, CERFA/IFRI, Institute for Russian and Eurasian Studies (IRES), Université d’Uppsala, Latvian Institute of International Affairs (LIIA), Université de Tartu, Université de Tallinn, CERCEC-EHESS, La contemporaine.

Réalisations :
  • Séminaire pluridisciplinaire (doctorat, master et recherches) « Espaces baltiques ». Dans le cadre d’une thématique annuelle large, le séminaire est ouvert aux sujets moins fréquemment traités, sans hiérarchie des objets de recherche, des disciplines ou des échelles de travail. Les thèmes annuels retenus sont : en 2018-2019 « Régionalisme dans l’espace baltique : Réseaux, coopération, intégration, circulation, diffusion d’idées et de pratiques », en 2019-2020 « Circulations et transferts dans l’Espace baltique : idées, pratiques, textes[1]», en 2020-2021, « Migrations, exil et diaspora » (à confirmer).
  • Journée d’études annuelle pour les doctorants et étudiants de master en sciences humaines et sociales travaillant sur les sociétés de la région baltique au sens large (INALCO/CREE et autres universités). La première JE a lieu le 13 décembre 2019 et réunit sept jeunes chercheurs des universités (Toulouse Jean Jaurès, ENS, EHESS, Paris-Diderot, Centre Marc Bloch à Berlin, INALCO, Université du Québec à Montréal ; Université de Namur (Belgique) et Université Paris-Est / IRSEM-DGRIS).
  • Publication en décembre 2019 du numéro thématique 133-134 « La question balte 1939-1989 » de la revue Matériaux pour l’histoire de notre temps (co-dirigé par Eric Le Bourhis) sur l’unification des pays baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie) au travers du pacte germano-soviétique et de ses conséquences.
  • Publication (prévue fin 2020) d’un dossier consacré à l’« Espace baltique à l’heure des replis identitaires » (co-dirigé par Nicolas Escach et Katerina Kesa) dans la revue pluridisciplinaire Connexe, les Espace(s) postcommunistes en question. Cette publication fait suite à la conférence « La région baltique à la recherche de son identité » (15 septembre 2017) ainsi que toute une série de séminaires organisés entre 2016-2017 au CREE sur les questions d’identité dans l’espace baltique.

2.3.2.  Populismes, médias et réseaux dans les pays de la région baltique : circulation des idées et des pratiques politiques

Responsable : Katerina Kesa

Dans les pays de l’espace baltique comme ailleurs en Europe, les mouvements populistes d’extrême droite ont fait ces dernières années une percée significative. Leur popularité grandissante en Estonie, en Lettonie, en Finlande, en Suède, au Danemark, en Pologne est entre autres liée à des sentiments de frustration provoqués par certains phénomènes de la mondialisation comme les inégalités. Elle se manifeste par un rejet de l’Autre/l’Étranger, par des replis identitaires et par une méfiance croissante d’une partie des populations de la région à l’égard des institutions et élites (nationales et européennes). Les réseaux sociaux ont contribué à conforter l’attraction de ces mouvements et à leur donner davantage de visibilité.
Ce projet de science politique a donc pour objectif de se pencher sur la manière dont les idées, valeurs ou pratiques politiques dites populistes circulent d’un pays à l’autre dans une région qui a comme particularité d’être un espace de coopérations, de contacts et d’échange d’influences. Il vise à stimuler et à confronter les recherches sur les coopérations régionales et les circulations transnationales des idées en s’intéressant aux aspects politiques et sociaux de la régionalisation de l’espace baltique. Il est en cela novateur : les travaux sur les circulations ont en effet jusqu’ici avant tout porté sur l’intégration économique, la coopération environnementale ou sur celle dans le domaine de la défense.
Dans le cadre de ce projet, de nombreux entretiens et discussion ont été menés (en Finlande, Suède, Estonie, Lettonie et France en 2019) avec les chercheurs et experts nordiques et baltiques politologues, historiens ou encore spécialistes de la communication travaillant sur les populismes dans l’espace baltique. Ce qui a également permis d’identifier et créer des contacts avec un réseau de chercheurs français et étrangers qui s’intéressent aux différents aspects de ces questions. Ce projet est financé en partie par le Projet blanc Jeunes Chercheurs 2018-2020.
 
Chercheurs associés au projet : Yoann Aucante (CESPRA-EHESS) ; Andres Kasekamp (University of Toronto) ; Jacques Rupnik (CERI Sciences Po) ; Anne de Tinguy (INALCO-CREE et CERI Sciences Po) ; Amélie Zima (IRSEM/CERCEC) 
 
Principales collaborations : CESPRA-EHESS, CERI Sciences Po, CERCEC, Université de Toronto, Université de Södertörn (Stockholm), Université de Helsinki, Université de Turku, Yohan Skytte Institute of Political Studies (Tartu), Université de Tallinn.
 
Réalisations :
  • Séminaire de recherche « Populismes et extrême droite dans l’Espace baltique : Réseaux, circulation d’idées et échanges de pratiques politiques » (12 novembre 2018) ;
  • Table ronde « Elections en Estonie, Lettonie, Lituanie, Finlande et Suède : Jusqu’où iront les populistes ? » (16 mai 2019)
  • Colloque international « Populismes, médias et réseaux dans les pays de l’espace baltique : Circulation des idées et des pratiques politiques » à l’INALCO (12 juin 2020)[2].
  • Une publication est envisagée à la suite du colloque sous forme d’ouvrage collectif ou d’un numéro de revue (2021-2022).

2.3.3.  Transformations urbaines en Union soviétique après 1945

Responsable : Eric Le Bourhis

Dans l’Europe communiste après 1945, et en particulier sur la rive sud de la mer Baltique, les transformations des villes sont réputées avoir été pilotées par des politiques de type soviétique imposées plus ou moins directement par Moscou. Ce sous-projet met à l’épreuve cette conception à partir d’une étude empirique en profondeur menée sur le cas de Riga, capitale républicaine la plus occidentale de l’URSS (incorporée à l’Union soviétique en 1940, reconquise en 1944). L’étude relève de l’histoire urbaine. Outre une meilleure connaissance des transformations de la société soviétique dans sa périphérie occidentale, cette étude du changement urbain (en termes matériels et sociaux) apporte des connaissances sur la soviétisation des régions satellisées et sur les conséquences de l’expansion de l’État soviétique, tout en mesurant le poids des spécificités locales dans ce processus.
Les lignes de recherches prolongent en partie une recherche de thèse (2015) portant sur la circulation de modèles et de savoir-faire vers Riga (depuis Moscou, mais également la Suède et la Pologne), la mise en pratique de politiques soviétiques urbaines engagées dans les années 1950 (construction, protection contre le danger atomique) et la soviétisation (épuration, féminisation) du groupe professionnel des architectes. Elles portent également sur les régimes de propriété et les expulsions de particuliers dans le contexte de nationalisation du sol imposé par l’URSS, et sur les conséquences de la croissance démographique du fait des migrations en provenance de Russie (enregistrement du lieu de résidence, construction de logements), et interagissent en ce sens avec le sous-projet 2.4.2.

Chercheurs associés : Isabelle Backouche (EHESS/CRH), Jean-Louis Cohen (Université de New-York), Jörg Hackmann (Université de Szczecin), Jānis Lejnieks (Musée d’architecture de Lettonie), Dominique Mongin (ENS, INALCO), Nathalie Montel (ENPC/LATTS).
 
Principaux partenaires institutionnels : CRH, CERCEC, EHESS, ENS, IRSEM, Musée d’architecture de Lettonie, Archives nationales de Lettonie.
 
Réalisations attendues :
  • Publication d’articles et de chapitres d’ouvrages collectifs en 2020-2021 ;
  • Publication d’un livre en 2022 ou 2023 ;
  • Dans le cadre du rapprochement entre l’INALCO et l’EHESS, ce projet alimente en partie le séminaire de master/recherche « Perdre son logement » à l’EHESS[3]

Projet 2.4. Mobilités, migrations, transferts

 
Responsables : Étienne Boisserie (CREE), Alisa Menshykova (UMR CERCEC-EHESS)
 

2.4.1. Être réfugié en Europe du Sud-est pendant la dernière phase de la question d’Orient : définitions, représentations, commémorations

Responsables : Joëlle Dalègre (CREE), Nicolas Pitsos (CREE)

Entre les Guerres balkaniques et le traité de Lausanne, en passant par la Grande Guerre, la région de l’Europe du Sud-Est, traversa une période de conflits qui ont marqué à la fois les contemporains et les générations postérieures. Leur mémoire est toujours présente dans l’espace public des sociétés concernées. Ces conflits ont également entraîné des migrations forcées de populations.
Ce projet vise à étudier les processus de production et d’expression d’identifications, d’images sociales, d’appartenances, de stratégies d’intégration/exclusion et de commémorations des événements et de leurs acteurs, autour des réfugiés issus des opérations militaires et/ou des négociations diplomatiques traçant de nouvelles frontières, pendant les années 1912-1923 en Europe du Sud-Est. L’identification concerne toute production de discours où la définition du réfugié, produite par une institution identificatrice extérieure, telle que la famille, l’entreprise, l’école, les syndicats, les partis politiques, les services municipaux, les instances étatiques (justice, ministère de la Santé publique, du Travail, de l’Intérieur, armée, police, Église) les organisations internationales (missions humanitaires), la presse et la littérature. Les images sociales renvoient à l’élaboration et à la diffusion de représentations stéréotypées de ces réfugiés dans divers supports écrits et/ou audiovisuels. Étudier leurs appartenances, implique de comprendre comment les individus concernés s’approprient, refusent, renégocient ou dépassent les identifications et les images leur étant associées.  Ce projet ambitionne de saisir les interactions entre ces trois processus, de définition catégorielle, de description représentationnelle, d’identification personnelle tout en suivant leur évolution à l’aune des événements de la vie sociopolitique, culturelle et économique dans l’Europe du Sud-Est, de l’entre-deux-guerres et jusqu’à nos jours. En même temps, il s’agit d’étudier également les interactions entre ces populations de « réfugiés » et les populations déjà installées sur place dans les sociétés d’accueil, ainsi que les enjeux mémoriels, dans les approches historiographiques, les échos littéraires, les débats médiatiques, déclinés en fonction des différentes séquences historiques et politiques. Concernant cette dimension du projet, il conviendrait de s’interroger sur l’intervention de l’histoire dans les débats publics et vice versa, l’irruption de l’opinion, mémoire « publique », collective, dans les raisonnements et les travaux des historiens et des législateurs. Toujours dans une telle perspective, une importance particulière sera accordée aux phénomènes, expressions-démonstrations de la mémoire collective et de ses degrés d’intégration sélective/partielle ou globale/inclusive du passé et de ses acteurs, ainsi que de son instrumentalisation pour la mise en place de dispositifs de réconciliation ou, au contraire, de stratégies de stigmatisation des pays voisins.
Les travaux de ce projet ont vocation à s’articuler avec ceux du projet de l’axe 3 sur les témoignages de crises, de conflits et d’exils dans les Balkans, des années 1940 à nos jours.
 
Chercheurs associés au projet : Étienne Boisserie (CREE), Nicolas Pitsos (CREE), Joëlle Dalègre (CREE), Bernard Lory (CREE), Aleksandra Kolakovic (Institut d’Études Politiques, Belgrade), Isabelle Depret (Université de Marmara), Iakovos Michailidis (Université Aristote), Dimitris Stamatopoulos (Université Makedonia), Claudiu-Lucian Topor (Université Alexandru Ioan Cuza, Iași), Amotz Giladi (EHESS).

Principales collaborations : UMR SIRICE (Sorbonne-Identités, Relations Internationales, Civilisations d’Europe), Paris-I Panthéon-Sorbonne – Sorbonne Université, Institut d’Études Politiques Belgrade, Université Aristote de Salonique, Université Makedonia de Salonique, Université Alexandru Ioan Cuza de Iași, Université de Marmara, EFA, IFEA, CETOBAC, Centre Norbert Elias (Université d’Avignon).
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Un colloque international ;
  • Organisation de tables rondes en collaboration avec les centres culturels des pays d’Europe du sud-est en France, avec comme objectif la diffusion des résultats des travaux de recherche menés dans le cadre du projet. 
Mots-clefs : thématique interdisciplinaire et transnationale ; histoires transfrontalières ; Europe du Sud-Est ; déplacements de populations ; réfugiés ; Question d’Orient ; commémorations ; usages du passé.

 2.4.2. Mouvements de population dans l’Europe médiane impériale et post-impériale Responsables : Étienne Boisserie (CREE), Balázs Ablonczy (MTA, Université ELTE, Budapest), Alisa Menshykova (UMR CERCEC-EHESS)

Le cadre spatial est constitué par les trois empires existant en 1914, avec une attention particulière accordée, aux  frontières orientales de l’empire allemand et occidentales de l’empire russe. Le cadre chronologique est celui du premier xxe siècle compris ici comme incluant l’immédiat après Seconde Guerre mondiale. Dans cet espace ainsi délimité, le projet se propose de travailler sur les temps de mouvements majeurs de populations civiles – hors cas spécifique de la Shoah – dans trois directions principales :
  1. Les mouvements intérieurs de population induits par l’occurrence de conflits. Cet angle concerne principalement la question des réfugiés dont nous privilégierons une approche micro-historique et régionalisée. Le champ d’étude principal de cette direction de recherche est la Première Guerre mondiale, aussi bien dans le temps de son déclenchement – qui implique le transfert de populations civiles proches des zones de combat et/ou réputées non fiables – que dans le temps du rapatriement ou de la réorganisation consécutive à la fin du conflit. À l’intérieur de cette séquence chronologique, seront observées les situations contrastées des populations concernées dans la dynamique de recherche ouverte par le colloque de juin 2018 sur les « perspectives locales de la sortie de guerre des territoires austro-hongrois ».
  2. Les transferts de population (expulsions,  échanges, politique de colonisation). Cet aspect de la question permettra d’observer en priorité les changements de population intervenus en Europe médiane dans la décennie 1938-1948 en portant une attention plus spécifique aux périodes 1938-1941 et 1945-1948. Il ne s’agit pas tant d’enjamber la Seconde Guerre mondiale que d’observer l’ampleur des transformations humaines dans une séquence chronologique qui l’inclut sans s’y réduire. L’ensemble de l’espace couvert, de la Baltique à l’Adriatique est soumis à des phénomènes convergents de transformations humaines radicales qui s’étalent sur une décennie. Incidemment, cette direction de recherche peut être reliée à la troisième qui sera observée dans le cadre de ce projet.
  3. Cette troisième direction sera plus spécifiquement consacrée à l’analyse de la politique migratoire française dans le premier xxe siècle. Elle s’appuiera sur les travaux des deux autres directions autant qu’elle pourra les enrichir. Elle reposera sur un atelier de recherche à construire à partir de 2020.
Chercheurs associés : Balázs Ablonczy (MTA, ELTE, Budapest), Gabriela Dudeková (Institut d’histoire de l’Académie slovaque des sciences, HÚ SAV, Bratislava), Iryna Dmytrychyn (CREE), Bruno Drweski (CREE), Francesco Frizzera (Université de Padoue), Irina Gridan (CREE), Anne Grynberg (CREE), Borut Klabjan (European University Institute, Florence), Jernej KOSI (Université de Ljubljana), Antoine Marès (Université Paris-I Panthéon-Sorbonne), Isabelle Davion (Sorbonne Université), Jean-Philippe Namont (post-doctorant), Tamás Révész (Université de Vienne), Kamil Ruszała (Université jagellonne de Cracovie), Urška Strle (Académie slovène des sciences et des arts, SAZU, Ljubljana), Peter Švorc (Université de Prešov, SK), László Vörös (HÚ SAV).

Partenaires institutionnels : Université de Ljubljana, Académie hongroise des sciences, UMR SIRICE, CERCEC, Institut d’histoire de l’Académie slovaque des sciences, Université de Padoue, Université de Vienne.

Réalisations attendues :
Les trois directions de recherche feront l’objet de réalisations de nature différente :
  • Premier volet : deux colloques (2020 et 2023) avec publication d’actes.
  • Deuxième volet (transferts de population, colonisation) : cycle de journée d’études (rythme annuel) à vocation régionale, combinant approches thématique et chronologique.
  • Troisième volet (exil) : Atelier de recherche : « Europe centrale et politique migratoire française ».
Trois ateliers, à un rythme annuel, à compter de 2020.
 
Mots-clés : réfugiés, exil, transferts de population, rapatriement, violences de guerre, guerres mondiales, politique migratoire française, immigration en France, politique de colonisation.

Projet 2.5. Histoire sociale du politique des périodes communiste et post-communiste en Europe Centrale et orientale : élites nationales, influences transnationales


Responsable : Irina Gridan (CREE)
 
Afin de mieux comprendre les repositionnements politiques et géopolitiques postérieurs aux sorties de la Guerre froide des pays du bloc de l’Est et de l’URSS/Russie, ce projet propose une analyse des recompositions des acteurs de la prise de la décision, de leurs réseaux et de leurs influences, ainsi que des pratiques des élites politiques, de leurs interactions et de leurs sociabilités. En partant du constat de la difficile émergence de la société civile et de ses revendications sur la scène politique à travers l’exemple très actuel des mouvements civiques en Roumanie, nous élargirons par la suite géographiquement la réflexion, en dressant un bilan des politiques de lustration à l’échelle de l’ensemble de la région. Enfin, une approche diachronique visera à interroger, en période communiste comme en période postcommuniste, les vecteurs, le rôle et le poids des politiques d’influence soviétiques puis russes à destination des élites des pays d’Europe centrale et orientale.
Il s’agit également d’aborder à l’aune des archives russes les circulations et les réseaux au sein du CAEM sur les questions environnementales : gestion des ressources, protection des zones humides et des deltas, projets transfrontaliers de parcs nationaux entre Académies des sciences d’URSS et des pays de « démocratie populaire » : Pologne, Tchécoslovaquie, Bulgarie, Roumanie, Hongrie notamment.
 
Chercheurs associés (et que l’on souhaite associer) au projet : Raluca Alexandrescu (Université de Bucarest), Vasile Buga (INST, Centre d’études russes et soviétiques), Ana Cătănuş (INST, Centre d’études russes et soviétiques), Laurent Coumel (CREE), Catherine Durandin (CREE), Katerina Kesa (CREE), Alexandru Mironov (INST), Sophie Momzikoff (CRHS – SIRICE), Cristina Preutu (Université de Iaşi), Agata Stolarz (Université de Lublin).
 
Principales collaborations envisagées : GDR Connaissance de l’Europe médiane, CRHS (Centre de recherche en histoire des Slaves), UMR SIRICE (Sorbonne Identités, relations internationales et civilisations de l’Europe), INST (Institut national pour l’étude du totalitarisme, Bucarest), Centre d’études russes et soviétiques de Bucarest, Faculté de sciences politiques de l’université de Bucarest, Faculté d’histoire de l’Université de Iaşi.
 
Manifestations de recherche prévues :
  • Automne 2019 : organisation d’une table ronde sur la thématique de la résurgence des sociétés civiles et de leurs difficiles inscription et expression dans l’arène politique, avec participation d’acteurs et de témoins issus de Roumanie et possibilité d’élargir à plusieurs pays d’Europe centrale et orientale ;
  • Printemps 2021 : tenue d’une journée d’étude sur la thématique de l’analyse comparée des renouvellements des personnels politiques et des lustrations en Europe centrale et orientale : modèles, politiques, effets, blocages ;
  • Automne 2021 : publication d’un numéro de revue thématique sur la question des lustrations ;
  • Printemps 2023 : organisation d’un colloque international sur la thématique des vecteurs de l’influence soviétique/russe sur les élites politiques communistes puis postcommunistes de l’espace de l’Europe centrale et orientale : les hommes et les réseaux, les formes matérielles et immatérielles ;
  • Automne 2023 : publication des actes du colloque international susmentionné. 
Mots-clefs : histoire politique ; histoire sociale du politique ; élites ; réseaux ; politiques d’influence soviétiques/russes ; recompositions postcommunistes ; lustrations ; sociétés civiles.

Projet 2.6. Des réformes aux transformations économiques et sociales dans les pays d’Europe centrale et orientale (Assen Slim, Julien Vercueil)

L’effondrement du système socialiste a entraîné l’élaboration de plusieurs conceptions de la transition, parfois résumées à l’opposition entre d’une part les tenants d’une vision téléologique du changement, lui proposant un modèle a priori, et d’autre part ceux qui proposent des visions évolutionnaires et historicisées, rejetant tout finalisme dans l’analyse des transformations.
 
Ces débats ont changé d’objet, mais les approches restent marquées par cette séparation méthodologique. Ce projet de recherche se propose de (1) confronter les approches du changement appliquées aux économies d’Europe centrale et orientale et d’Eurasie, (2) contribuer à la construction d’un cadre d’économie politique susceptible de rendre compte des transformations contemporaines de ces sociétés, et (3) dégager et analyser les enjeux des rapports de ces pays à l’Union européenne, notamment dans les domaines de l’intégration économique et institutionnelle.
 
1. Les conceptions du changement systémique 
Le changement systémique ayant eu lieu à des rythmes et selon des modalités différentes dans la région malgré les approches souvent unificatrices des grandes institutions internationales (FMI, Banque mondiale, OCDE, UE, BERD), ces dernières ont été forcées d’intégrer quelques résultats obtenus par les approches alternatives du changement systémique, comme l’importance des institutions formelles et informelles dans la réponse des acteurs individuels et collectifs aux impulsions politiques, le rôle du rythme et de la cohérence des réformes dans leur efficacité, la nécessité de prendre en compte la dimension historique dans la compréhension des trajectoires (path dependency). Notre hypothèse est que ce cadre d’économie institutionnelle peut s’avère utile non seulement pour appréhender les transformations économiques et sociales dans les PECO mais également pour se saisir de changements majeurs de modèles de croissance (liés aux problématiques d’innovation socio-économique, de développement durable, d’économie collaborative, sociale et solidaire, ou de société de décroissance), dans les pays de la zone couverte par le CREE-INALCO.
 
2. Les transformations socio-économiques contemporaines dans les PECO 
Les transformations économiques et sociales dans les PECO ont donné lieu à des « surprises de la transformation » (M. Ellman). Ces situations inattendues, parfois contradictoires avec les objectifs initialement fixés, touchent les questions monétaires (inflation inertielle, W. Andreff), macro-économiques et productives (récession transformationnelle, J. Kornaï), microéconomiques et managériales (enracinement des managers, non-renouvellement des élites économiques, B. Chavance, E. Magnin, G. Mink), ou de gouvernance d’entreprise (propriété enchevêtrée, E. Magnin). Les conséquences socio-économiques du changement, d’abord en termes de pauvreté, puis en termes de disparités socio-économiques, n’ont pas toujours été prises en compte par initiateurs des réformes systémiques. Notre programme visera à proposer des analyses de ces transformations qui intègrent la dimension sociale. 
 
3. La relation à l’Union européenne 
Les élargissements de 2004, 2007 et 2013 ont créé une nouvelle géo-économie de l’Europe centrale et orientale. La définition de l’acquis communautaire et les prescriptions associées, la succession de programmes d’assistance de l’UE (PHARE, ISPA, SAPARD), les accords commerciaux de première et deuxième générations et les regroupements sub-régionaux ont reconfiguré la relation économique des pays de la région avec leurs partenaires d’Europe occidentale. En une période où l’UE connaît une crise institutionnelle et politique, les questions de convergence/divergence, de solidarité, mais aussi de concurrence intra-communautaire se trouvent au centre des réflexions. Il s’agit ici d’en détailler les enjeux pour esquisser les perspectives de la construction européenne et de l’évolution future de ses relations avec ses voisins.
 
Principales collaborations envisagées :
Laboratoire Dynamique des sciences sociales et recomposition des espaces (Ladyss, Paris 7 Diderot) au sein duquel plusieurs de nos collègues économistes travaillent sur les transformations économiques en Europe de l’Est. Poursuite du projet collectif de recherche avec les auteurs du Tableau de bord des pays d’Europe centrale et orientale et d’Eurasie (Presses de l’INALCO, 2019).

Manifestations de recherche :
  • Journée d’études sur les changements de paradigme organisée par le GDR Europe médiane et le CREE
  • Préparation de la publication biennale du Tableau de bord des pays d’Europe centrale et orientale et d’Eurasie (horizon 2021)
  • Atelier sur les approches du changement systémique (courant 2021).
  • Publication d’un dossier thématique sur les transformations sociales en Europe de l’Est dans une revue académique.
Mots-clefs :
Transition économique, analyse du changement systémique, transformations économiques et sociales dans les PECO, institutions formelles et informelles, élargissement de l’UE, Convergence/divergence, programme d’assistance, politiques européennes.

​AXE 3 – Crises et conflits modernes et contemporains

Responsable : Etienne Boisserie (CREE)

L’axe « Crises et conflits modernes et contemporains » est principalement constitué de projets qui poursuivent ceux du précédent quinquennal – pour partie des projets issus du thème A (projet 3.1), pour partie du thème B (projets 3.3 et 3.4) – qu’il est apparu utile de réunir en raison de leur complémentarité et des synergies qui peuvent être créées avec deux projets plus récents dans leur formalisation (3.2 et 3.5).
L’axe se décompose en deux grands champs d’étude qui couvrent l’ensemble de l’Europe médiane et du monde russe : d’une part, une dimension historique qui aborde prioritairement les deux grands conflits mondiaux du xxe siècle, aussi bien l’événement en tant que tel que ses dimensions mémorielle et symbolique dans une perspective d’histoire culturelle et sociale. D’autre part, une analyse des conflits contemporains, transversale et pluridisciplinaire, qui se propose de mettre en évidence les différentes formes de crises et de risques dans les territoires périphériques de la Russie, aussi bien en Asie centrale et au Caucase qu’en Ukraine (3.4). L’approche du projet 3.5 est à bien des égards complémentaire ; elle se propose d’observer sur la moyenne et la longue durée les éléments structurant durablement les sociétés d’Europe médiane soumises à des effets de tensions entre deux espaces – noyau initial de l’Union européenne et États post-soviétiques – et propose de s’interroger sur la pertinence des catégories classiquement utilisées.
Cet axe permet donc d’embrasser les crises et les conflits dans différentes configurations et à différentes échelles en couvrant prioritairement le premier xxe siècle et les crises contemporaines dans notre espace d’étude. À l’intérieur de cet axe, les complémentarités sont fortes entre les projets 3.1 à 3.3 d’une part, et entre les projets 3.4 et 3.5 d’autre part. De même, les « veilles Ukraine » intégrées au projet 3.3 ne sont pas disjointes des activités de l’Observatoire des États post-soviétiques.
Dans leur partie historique, les travaux de cet axe ont vocation à se combiner avec le projet 1.2. (Le patrimoine dans les espaces post-soviétiques). Dans la dimension plus contemporaine de l’analyse des crises, la complémentarité avec les projets de l’axe 2 (notamment les projets 2.1 et 2.2) est certaine.
 
Projets :

  • Projet 3.1. L’Europe médiane dans la Grande Guerre : de l’événement aux traces (Étienne Boisserie)
  • Projet 3.2. L’Ukraine face à ses crises aux xxe et xxie siècles (Iryna Dmytrychyn)
  • Projet 3.3. Témoignages de crises, de conflits et d’exils dans les Balkans, des années 1940 à nos jours (Christina Alexopoulos, Joëlle Dalègre)
  • Projet 3.4. Les sociétés post-communistes face aux crises et aux risques en Eurasie (Catherine Poujol, Jean Radvanyi, Laurent Coumel, Sophie Hohmann)
  • Projet 3.5. Conflits et mutations dans les espaces européens et eurasiatiques (Bruno Drweski)

 

PROJET 3.1. L'Europe médiane dans la Grande Guerre : de l'événement aux traces 


Responsable : Etienne Boisserie (CREE)

L’approche de ce projet est primordialement historienne, mais elle peut être enrichie d’autres apports disciplinaires.
Elle prend en compte les mouvements de populations et les recompositions, les politiques symboliques et les nouveaux récits, les permanences, ruptures et recompositions intellectuelles, sociales, culturelles, les échanges intra-régionaux.
Une attention particulière sera portée à la recomposition initiale (période 1919-1923) (« Europe médiane des traités de paix ») et à l’observation de ses effets sur les populations ; en ce sens, ce projet poursuit en partie en l’élargissant thématiquement le projet « construction nationale » du quinquennal (2014-2018).
Le projet se décompose en deux grands ensembles ; l’un qui poursuit et approfondit des thématiques de recherche déjà développées lors du précédent quinquennal, l’autre qui  ouvre à d’autres temps des conflits contemporains, par la recherche sur leur impact et leurs représentations.

3.1.1. The Habsburg Empire in the Great War. A Historiographical Handbook.

Responsable : Etienne Boisserie (CREE)

Il s’agit d’une transformation et d’un élargissement du groupe de travail consacré aux historiographies slaves de la Grande Guerre qui a donné lieu à trois ateliers au cours du précédent projet.
Cette évolution repose sur le constat partagé de l’absence d’un outil scientifique synthétique sur l’objet. Le projet aboutira à une écriture collective thématisé incluant une vingtaine de chapitres de chercheurs reconnus dans le domaine des études de l’Autriche-Hongrie en guerre. L’ouvrage sera rédigé en anglais et publié par un éditeur britannique.
Un atelier de travail annuel ou biannuel scandera le travail d’écriture.
 
Chercheurs associés, co-responsables : Rok Stergar, Tamara Scheer, John Paul Newman, Kamil Ruszała, Gabriela Dudeková, Rudolf Kučera.
 
Institutions associées : Université Maynooth (Irlande), Université jagellone de Cracovie, Université de Ljubljana, Institut Masaryk de l’Académie tchèque des sciences, Institut d’histoire de l’Académie slovaque des sciences, Ludwig Boltzmann Institut, Vienne.
 
Réalisations attendues :
  • publication de l’ouvrage en 2020 ou 2021. 

3.1.2. Le front austro-italien (1915-1918)

Groupe international de recherches.
Responsable français : Etienne Boisserie (CREE)

Ce projet repose sur la pérennisation des travaux d’un groupe de recherche international initié par le CREE en 2016 et qui se fixait comme objectif de travailler spécifiquement sur le front austro-italien (voir exposé général des motifs ici : http://www.inalco.fr/appel-communication/front-austro-italien-1915-1918). Depuis sa constitution, ce groupe de recherche a organisé trois colloques :
Padoue : http://www.sissco.it/evento/soldati-e-quotidianita-della-guerra-sul-fronte-dellisonzo-2/ 
Paris : http://www.inalco.fr/evenement/guerre-armes-refugies-prisonniers-front-austro-italien-1915-1918-0
Ljubljana : http://www.ff.uni-lj.si/sites/default/files/Dokumenti/Dejavnosti/Novice/victory-to-defeat-programme.pdf
Ils ont permis une ouverture et une consolidation du réseau international travaillant sur cet objet et ces colloques sont devenues l’unique lieu d’échanges sur les progrès de la recherche international sur cet objet.
La responsabilité scientifique des colloques est assurée conjointement par ses partenaires historiques – dont le CREE – et un comité national ad hoc mis sur pied par l’institution invitante.
 
Chercheurs associés (responsables) : Catherine Horel, Rok Stergar, Marco Mondini, Michal Kšiňan membres du comité scientifique permanent. Chaque colloque associe ce comité permanent et un Comité national de l‘institution invitante.

Partenaires institutionnels : UMR SIRICE (Paris-I Panthéon-Sorbonne – Sorbonne Université), Université de Ljubljana, Université de Padoue, Institut d’histoire de l’Académie slovaque des sciences.

Réalisations attendues :
  • Conférence biannuelle (2019, 2021, 2023), lieu tournant (mai 2019, Bratislava), publication des actes. 

3.1.3. La Grande Guerre sur les territoires des empires centraux : représentations et narrations.

Responsables : Etienne Boisserie (CREE), Jiří Hnilica (Université de Pardubice)

La dimension mémorielle et symbolique de la Grande Guerre est un objet connu de longue date du champ historien français, allemand ou italien notamment. En Europe centrale, cet événement a laissé des traces d’une autre nature, très directement intégrée dans un discours essentiellement téléologique dans les États successeurs vainqueurs – créés ou agrandis après le conflit – ou primordialement victimaire pour les États successeurs défaits. La mémoire du conflit, outre cette différence initiale, peut être brouillée par d’autres événements –guerre civile en Hongrie, guerre polono-soviétique – qui ont concentré l’attention des historiens par leur valeur « fondatrice » du nouvel ordre post-impérial. Les périphéries de l’empire confrontent également les historiens à des mémoires fragmentées ; c’est le cas de l’approche des territoires de Galicie orientale ou des régions aux confins de l’Autriche, de l’Italie et de la Slovénie.
Ces configurations multiples ont produit des politiques mémorielles et des constructions qui font l’objet d’un programme de recherche coordonné par Jiří Hnilica (Université de Pardubice, CZ) auquel le CREE est associé. Nous observerons les traces du conflit mondial par deux angles principaux : leur dimension monumentale et leur dimension commémorative.
 
Chercheurs associés : Juraj Babják (Université Comenius de Bratislava), Jiří Hnilica (Université de Pardubice, CZ), Michal Kšiňan (Institut d’histoire de l’Académie slovaque des sciences, HÚ SAV), Kamil Ruszała (Université jagellonne de Cracovie).
 
Partenaires institutionnels : Université de Pardubice, Université jagellonne de Cracovie, Institut d’histoire de l’Académie slovaque des sciences.
 
Réalisations attendues :
  • Journées d’études. 
Mots-clés : Autriche-Hongrie, Grande Guerre, historiographie, front austro-italien, histoire culturelle, politique mémorielle.

3.1.4. Les cités invisibles/revisitées : destin des patrimoines et héritages urbains en Europe du Sud-Est, à la sortie des deux guerres mondiales

Responsables : Joëlle Dalègre (CREE), Nicolas Pitsos (CREE)

D’Istanbul à Sarajevo et de Iași à la Canée, les centres urbains des pays recouvrant l’espace de l’Europe du Sud-Est ont connu des métamorphoses de leur physionomie liées à la gestion de leur patrimoine suite aux conflits des années 1914-1922, 1940-1945 et aux conséquences que ces conflits ont eu sur la composition sociodémographique locale. Si les migrations des populations dans un contexte post-ottoman, à la veille et au lendemain de la Première Guerre mondiale, fournissent le cadre historique dans lequel s’intègrent ces phénomènes, ce sont surtout les conséquences de la Shoah qui ont marqué la période après la Seconde Guerre mondiale.
Ce projet vise à réunir des chercheurs qui s’intéressent aux politiques déployées à l’échelle de la société locale ou des États concernés. Comment ces patrimoines et/ou héritages ont-ils été évoqués dans la littérature, les mémoires personnelles, les discours politiques, les travaux historiographiques ? Quelles sont les temporalités dans lesquelles se sont inscrits leur effacement symbolique ou physique, ou au contraire leur mise en valeur et/ou leur commémoration dans l’espace public ? Des politiques d’occultation voire de destruction et/ou de transformation volontaire des traces d’héritages culturels liés à la présence de communautés linguistiques et confessionnelles d’avant les conflits de ces deux périodes, aux initiatives de sensibilisation aux patrimoines multiples des villes concernées, censées entretenir une mémoire urbanistique plurielle, il s’agit de comprendre dans quel contexte historique et politique ces phénomènes se sont manifestés et avec quels résultats sur le tissu urbain.
Les problématiques soulevées dans ce projet pourraient rejoindre celles du projet de l’axe 1, sur l’architecture et le patrimoine dans les États post-soviétiques.
 
Chercheurs associés au projet : Étienne Boisserie (CREE), Nicolas Pitsos (CREE), Joëlle Dalègre (CREE), Kalliopi Amygdalou (Université d’Izmir), Aleksandra Kolakovic (Institut d’Études Politiques, Belgrade), Aleksandra Ilijevski (Université de Belgrade), Claudiu-Lucian Topor (Université Alexandru Ioan Cuza, Iași).
 
Principales collaborations : UMR SIRICE (Sorbonne-Identités, Relations Internationales, Civilisations d’Europe), Institut d’Études Politiques Belgrade, Institut d’Études balkaniques (Sofia), Université Alexandru Ioan Cuza de Iași, European Association of Urban History (EAUH), Fédération internationale pour l’histoire publique (FIHP).
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Un séminaire doctoral et de recherche : « Gestion d’héritages/patrimoines urbains à la sortie des conflits en Europe du Sud-Est au xxe siècle » ;
  • Un colloque international sanctionné par une publication ;
  • Organisation de tables rondes en collaboration avec les centres culturels des pays d’Europe du sud-Est en France (Centre culturel hellénique, Centre culturel bulgare, Centre culturel serbe, Centre culturel Anatolie, Maison d’Albanie, Centre culturel roumain) et des centres culturels français en Europe du Sud-Est, avec comme objectif la diffusion des résultats des travaux de recherche menés dans le cadre du projet. 
Mots-clefs : thématique interdisciplinaire et transnationale ; patrimoine architectural ; Europe du Sud-est ; déplacements de populations ; réfu
giés ; question d’Orient ; Shoah ; mémoire sélective.

3.1.5 Désintégration yougoslave et construction européenne  

Responsable : Anne Madelain 

L’éclatement de la Yougoslavie (1991-1999) et les conflits qui l’ont accompagné ont coïncidé avec l’effacement des régimes communistes en Europe médiane et mais aussi avec le renforcement de l’Union européenne comme entité politique et économique. Ce projet interroge les lectures, traces, mémoires des conflits yougoslaves ainsi que la façon d’écrire aujourd’hui l’histoire de la Yougoslavie socialiste dans les pays successeurs de la Fédération et ailleurs en Europe, en particulier en France. 
Il s’agit d’analyser la transformation des paradigmes (par exemple des notions de « peuple », « ethnicité », « guerre » ainsi que les formes des mobilisations collectives) pour écrire une histoire connectée des années 1990 en Europe. On s’interrogera aussi sur les formes concrètes prises par l’espace post-yougoslave trente ans après la disparition de la fédération, ainsi que sur les circulations intellectuelles internationales dans laquelle la Yougoslavie a été auparavant impliquée. Ce projet s’inscrit dans la démarche développée dans L’expérience française des Balkans (1991-1999)(PUFR 2019), et approfondit les travaux menés dans le cadre de plusieurs journées d’études internationales organisées entre 2016 et 2019 en association avec le Centre d’histoire sociale des mondes contemporains (université de Paris 1 Panthéon Sorbonne, CNRS), le Centre d'études turques, ottomanes, balkaniques et centrasiatiques  (CETOBAC, EHESS-CNRS) et le Centre d’études des mondes russes, caucasiens et centre-européens (CERCEC, EHESS-CNRS) et suivies de publications.
 https://www.cairn.info/revue-revue-d-etudes-comparatives-est-ouest-2019-...
https://journals.openedition.org/rhsh/371
 
Chercheurs associés: Snježana Banović (Académie des arts dramatiques, Zagreb), Agustin Cosovski (CETOBaC, EHESS), Igor Duda (CKPIS, université de Pula), Frank Georgi (IDHE.S, Université Évry, Val-de-Seine), Ana Miškovska-Kajevska (University of Amsterdam), Dubravka Stojanović (Université de Belgrade), Ivana Spasić (Université de Belgrade), Nermina Zildzo (international university of Sarajevo).
Principales institutions partenairesCentre de recherches culturelles et historiques du socialisme (CKPIS, Pula), Université Juraj Dobrila de Pula (Croatie), CETOBaC (EHESS, CNRS), CERCEC (EHESS, CNRS).
 
Réalisations attendues
Plusieurs journées d’études suivies de publications 
Une exposition sur l’art et la guerre à Sarajevo 

3.1.6. Histoire et mémoire de la Shoah

Responsable : Eric Le Bourhis
 
Les travaux sur la Shoah se sont longtemps concentrés sur l’histoire des lieux d’internement et d’extermination. Ceux sur la mémoire du génocide se sont essentiellement intéressés au monde occidental durant la guerre froide (procès, historiographie, témoignages de survivants…). Les enquêtes comprises dans ce sous-projet participent à un effort de renouvellement qui se penche justement sur des objets jusque-là négligés :
  • les milieux urbains ordinaires, au sein desquels la persécution antijuive a commencé avant et pendant la Shoah, et qui furent profondément transformés par celle-ci (1) ;
  • la mémoire du génocide en URSS autour des procès des collaborateurs des nazis (2).
Ces enquêtes prolongent des travaux de post-doctorat menés sur plusieurs terrains en Lettonie. Elles sont élargies grâce à l’étude des circulations (individus, informations, pratiques) et d’un dialogue avec d’autres terrains (dans le bloc de l’Est, comparaison Est-Ouest, enquête collective sur la persécution en région parisienne), au sein de deux collectifs de recherche.
(1) L’enquête sur la persécution antijuive en milieu urbain emploie des méthodes de microhistoire et d’histoire urbaine pour étudier le quotidien des Juifs et de leurs voisins, avant, pendant et après la persécution et l’extermination. Elle s’inscrit dans un projet collectif « Connus à cette adresse. Villes et dynamiques sociales des persécutions antijuives en Europe (1936-1948) », créé au Centre de recherches historiques (EHESS) en 2016, et bénéficie de coopérations avec d’autres équipes, telles que le Holocaust Geographies Collaborative. L’enquête suit plusieurs lignes de recherche : persécution au quotidien à Riga en URSS occupée, replacée dans le contexte des mouvements de population de la fin des années 1930 à la fin des années 1940 ; parcours et expériences au travers de la Seconde Guerre mondiale des réfugiés juifs dans la région de la mer Baltique, et des Juifs baltes, polonais ou russes en Europe de l’Ouest (coopération possible avec le sous-projet 2.4.2 et avec le CERMOM).
(2) L’enquête sur les procès des collaborateurs des nazis en URSS poursuit le projet ANR jeunes chercheurs « Les crimes de guerre nazis dans le prétoire – Europe centrale et orientale 1943-1991 » (2017-2020) basé au CERCEC et coordonné par Vanessa Voisin (Université de Boulogne). Elle comprend plusieurs lignes de recherche : histoire des procès menés en Lettonie entre 1944 et 1974 (avec la diversité des victimes propre à l’URSS) ; dynamiques de ladite « seconde vague » de procès soviétiques à partir de 1957 ; mécanismes de l’écriture de l’histoire de la guerre et de la Shoah à l’Est au travers des procès ; rapports entre la société et une justice très politique.
 
Chercheurs associés : Isabelle Backouche (CRH/EHESS), Shannon Fogg (Missouri University of Science and Technology), Sarah Gensburger (CNRS/ISP), Cyril Grange (CNRS/Centre Roland Mousnier), Laurent Joly (CRH/EHESS), Nadège Ragaru (Sciences Po), Constance Pâris de Bollardière (American University in Paris), Simon Perego (Inalco/CERMOM), Irina Tcherneva (CNRS/Eurorbem), Vanessa Voisin (Université de Bologne/CERCEC).
 
Réalisations :
  • Livre sur la « publicisation » des procès de criminels nazis en Europe centrale et orientale en 2022, qui paraîtra chez University of Rochester Press / Boydell and Brewer (co-dirigé avec Irina Tcherneva et Vanessa Voisin)
  • Publications :
  1.  dossier « Persécution des Juifs et espace urbain », Histoire urbaine, n° 62 (3), 2021, co-dirigé avec Isabelle Backouche et Sarah Gensburger.
  2.  article « Spoliation et voisinage. Le logement à Paris, 1943-1944 », Histoire urbaine, n° 62 (3), 2021, p. 79-102 (avec Isabelle Backouche et Sarah Gensburger).
  3.  article « Du refuge au piège. Les exilés juifs allemands à Riga, 1938-1941 », Matériaux pour l'histoire de notre temps, 2019, 133-134 (3-4), p. 40-46.
  4.  article « La spoliation en pratiques. Riga 1939-1942 », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2018, 65 (3), p. 120-150. Traduction anglaise disponible en ligne sur Cairn international : "Dispossession as practice. Riga, 1939–1942"
  5.  chapitre „NS-Verbrechen vor Gericht. Sowjetische Kriegsverbrecherprozesse 1943–1991“, in Enrico Heitzer, Günter Morsch, Robert Traba, Katarzyna Woniak (eds.), Im Schatten von Nürnberg. Transnationale Ahndung von NS-Verbrechen, Metropol, Berlin, 2019, p. 261-271. Et traduction polonaise : "Nazistowskie zbrodnie przed sądem. Sowieckie procesy zbrodniarzy wojennych 1943−1991”, in Enrico Heitzer, Günter Morsch, Robert Traba, Katarzyna Woniak (eds.), W cieniu Norymbergi. Transnarodowe ściganie zbrodni nazistowskich, Warszawa, Instytut Studiów Politycznych Polskiej Akademii Nauk, 2019, p. 331-344.
  • Séminaire de master/recherche de l’EHESS (en coopération avec le Mémorial de la Shoah) « Acteurs et institutions ordinaires face à la persécution des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Le cas de Paris et des villes européennes » (animé avec Isabelle Backouche, Sarah Gensburger, Laurent Joly et Karen Taïeb) [https://enseignements.ehess.fr/2021-2022/ue/213].
 

Projet 3.2. L’Ukraine face À ses crises aux XXe et XXIe siècles


Responsable : Iryna Dmytrychyn (CREE)
 
Nous poursuivons le travail de recherche spécifique sur l’Ukraine au xxe siècle tout en tenant compte des besoins d’interaction avec l’extérieur et d’explicitation des enjeux mémoriels et symboliques contemporains du pays.
Une partie des projets, en particulier les cycles de conférence sur les enjeux politiques et géostratégiques contemporains – et qui poursuivent ce qui a été entamé en 2014 et est détaillé dans le bilan –, ne peut être anticipée, mais ces cycles constitueront un élément de ce projet.
En l’état, et pour ce qui est en préparation, ce projet se décline en plusieurs sous-projets qui mettent l’accent sur les phases de crises, de tensions et de recomposition de cet espace, en particulier dans la première moitié du xxe siècle. Outre la « veille Ukraine » spécifique, qui a été mise en place en 2014 et se poursuivra, plusieurs opérations de recherche complémentaires les unes des autres sont ainsi envisagées.

3.2.1. Cycle « Centenaire des États ukrainiens »

Nous poursuivrons le cycle entamé en 2017 en commémoration du centenaire de la première indépendance ukrainienne. Le premier colloque international « Émergence de l’Ukraine », s’est tenu en décembre 2017 (http://www.inalco.fr/evenement/emergence-ukraine) et a été associé à une exposition tenue à la Bulac (http://www.bulac.fr/conferences-rencontres/centenaire-des-revolutions-russes/1917-emergence-de-lukraine/).

Deux autres colloques sont programmés au début et à la fin de l’année 2019. Ils seront consacrés à  l’éphémère mais symbolique union de la République populaire d’Ukraine et de la République populaire d’Ukraine occidentale ainsi qu’aux violences antisémites qui ont marqué l’année 1919.
 
Chercheurs associés au projet et collaboration potentielle : Youri Shapoval, Académie des Sciences, Isabelle Davion (Sorbonne Université, UMR SIRICE), et François-Xavier Nérard (Université Paris-I Panthéon-Sorbonne)
Principales collaborations envisagées : Académie nationale des sciences de l’Ukraine (NANU), UMR SIRICE (Sorbonne Université et Paris-I Panthéon Sorbonne)
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Deux colloques (2019) avec publication d’actes ;
  • Publication des actes du colloque de 2017. 
Mots-clefs : Histoire de l’Europe orientale, construction étatique, pogroms et violences antisémites, relations internationales, Ukraine, Russie
 
Ce projet est complémentaire du projet « La Grande Guerre en Europe médiane : de l’événement aux traces » tout en s’en distinguant par son type de périodisation et par ses objets. Il est étroitement articulé avec le projet 3.2.2 dont il constitue un prolongement et un approfondissement.

3.2.2. L’Ukraine dans la Grande Guerre

Préparation et publication de l’édition française de Velyka vijna 1914-1918rr. i Ukrajina [La Grande Guerre et l’Ukraine], publié sous la direction d’Oleksandr Rejent (Académie ukrainienne des sciences), aux éditions Clio à Kyiv (2014 (vol. 1), 2015 (vol. 2)). Textes traduits par Guy Imart, éditeur : Institut d’études slaves. La parution de l’ouvrage est prévue en 2019. Cet ouvrage est la première synthèse ukrainienne « post-soviétique » sur le sujet ; il prend en compte les développements les plus récents de l’historiographie, et en particulier l’élargissement de l’étude à l’histoire culturelle.
Ce projet d’édition s’inscrit pleinement dans l’articulation des deux espaces, centre-européen et russe, dont le CREE favorise les synergies. Il est par ailleurs complémentaire du projet 3.1 (« L’Europe médiane dans la Grande Guerre : de l’événement aux traces »). La Grande Guerre est un excellent observatoire des zones de frottement et de concurrence dont le territoire ukrainien est un exemple archétypal. L’ouvrage édité permet d’observer les évolutions dans cet espace périphérique des deux grands empires de l’époque, foyer vivace d’une réflexion politique et culturelle aux emprunts multiples qui se structure au xixe siècle et marque l’ensemble du xxe siècle. 
 
Chercheurs associés au projet : Étienne Boisserie (CREE), Iryna Dmytrychyn (CREE), Alisa Menshykova (UMR CERCEC, EHESS), Oleksandr Rejent (Académie nationale des sciences de l’Ukraine [NANU]).
 
Institutions associées au projet : Institut d’Histoire de l’Ukraine de l’Académie nationale des sciences de l’Ukraine [IIU NANU] de Kyiv ; Institut d’études slaves de Paris ; UMR CERCEC, EHESS.
 
Mots-clefs : Grande Guerre, Ukraine, Galicie, Puissances centrales, Russie, histoire politique, histoire sociale, relations internationales.

3.2.3. Villes d’Ukraine

Nous poursuivrons également le cycle des villes d’Ukraine, étudiées dans leur environnement régional, leur contexte historique et représentation mémorielle.
Le contrat précédent après Kyiv, « La bataille autour d’un héritage » (1er décembre 2016) http://www.inalco.fr/evenement/kiev-kyiv-bataille-autour-heritage et Tchernivtsi (Czernowitz), « Cartographier les nostalgies d’un lieu » (7-8 octobre 2016) http://www.inalco.fr/sites/default/files/asset/document/programme_cartographier_vf.pdf en 2016, nous prendrons la ville de Kharkiv, centre intellectuel depuis xixe siècle et capitale de l’Ukraine jusqu’en 1934 : vie politique et intellectuelle, artistique et littéraire.
 
Chercheurs associés au projet et collaboration potentielle : Sylvie Archaimbault (CNRS, UMR Eur’Orbem), Institut d’Etudes Slaves, Université de Kharkiv.
 
Mots-clefs : histoire de l’Europe orientale, construction étatique et identitaire, langue et littérature ukrainienne, histoire culturelle.

3.2.4. L’Ukraine, enjeux géopolitiques entre les deux guerres

Un travail de recherche et de dépouillement dans les Archives du ministère des Affaires étrangères et européennes, concernant les questions ukrainiennes entre les deux guerres.
Deux projets de recherche avec publications envisagées dans le cours du quinquennal :
  • Une monographie sur le voyage d’Édouard Herriot en Ukraine en août 1933, en pleine famine et sur la manière dont il en rendu compte en Occident. Ce projet inclut des recherches menées de longue date dans les archives françaises et ukrainiennes. Les dernières recherches complémentaires devraient permette de finaliser la rédaction dans la première moitié du quinquennal.
  • Une étude plus courte sur l’activité du consulat de France à Lviv au cours de la même période, destinée à faire saillir les principaux enjeux tels qu’ils sont perçus par la France et sa représentation, en particulier au cours de la famine.
Principales collaborations : Archives du Ministère des Affaires étrangères et européennes.
 
Mots-clefs : Histoire de l’Europe orientale, totalitarisme, famines soviétiques.
 

Projet 3.3. Témoignages de crises, de conflits et d’exils dans les Balkans des années 1940 À nos jours.


Responsables : Christina Alexopoulos (CREE), Joëlle Dalègre (CREE).
 
Ce projet s’inscrit dans la continuité des travaux de recherche déjà entamés sur l’expression testimoniale des acteurs dans les Balkans du xxe et du xxie siècles en relation avec un contexte social, particulièrement marqué par des crises institutionnelles, politiques et économiques des périodes de guerre, de guerre civile ou de dictature, des pratiques répressives et contestataires, qu’il s’agira de continuer à explorer dans la diversité de leurs représentations.
            Quelles narrations de mémoires divisées des conflits surgissent-elles au sein de différentes communautés et comment continuent-elles à évoluer au fil du temps ? Quelles sont les interactions entre les discours dominants et les récits minoritaires et comment de nouveaux positionnements peuvent-ils émerger, en créant des continuités et des ruptures historiques avec des attitudes déjà adoptées ? Quelles sont les formes, les fonctions et les usages de ces narrations dans les discours publics mais aussi dans la formation des constructions identitaires des acteurs ?

3.3.1. Interactions discursives et narrations de mémoires divisées : quelles évolutions ?

Étudier la pluralité des mémoires dans des contextes de conflit, entre socle commun de représentations construites en miroir, mais aussi limites de cette symétrie – notamment à travers les spécificités de chaque discours et des pratiques qui lui sont afférentes – sera un premier axe de recherche, très attaché à l’évolution des représentations, à la dynamique du changement porté par les différents acteurs et aux conséquences des transformations de perception et de mise en récit du passé dans l’espace public. Nous l’aborderons par plusieurs angles complémentaires : en premier lieu par l’expression testimoniale autour de la guerre civile grecque – à penser dans le contexte d’autres conflits dans les Balkans et en Méditerranée – et de la résistance à la « dictature des colonels ». En second lieu, par une réflexion sur l’expérience de l’exil des réfugiés politiques est aussi à penser dans sa conflictualité entre attache au pays d’origine et nécessité d’investir le pays d’accueil.
Il importe aussi d’étudier l’interaction des différents discours, à la fois au sein d’un pays et entre pays voisins pour mieux comprendre la formation de nouveaux positionnements au sein de différents groupes. Cette interaction est à entendre à la fois du côté d’oppositions de longue date sur des questions qui divisent et dont il serait intéressant de comprendre les enjeux et du côté du rapport de force et de sens entre narrations hégémoniques et émergence de nouveaux paradigmes de compréhension. Nous aborderons en particulier la question du nom de la Macédoine par exemple, point de discorde entre l’État grec et la République de Macédoine, est intéressante à explorer par les différents positionnements géopolitiques et historiques des acteurs. De même, nous observerons la mémoire séfarade dans les Balkans et la place que les populations juives ont pu occuper à la fois dans la mise en récit de leur histoire et dans les représentations et la construction d’une image de l’altérité par des populations non juives de la région. Il sera enfin utile d’observer la question de la reconnaissance des droits des différentes minorités qui se pose avec une acuité toute particulière pour différents groupes ethniques et confessionnels dans la région, notamment pour la population rrom.

3.3.2. Formes, fonctions et usages des narrations mémorielles dans l’espace public

Travailler sur les narrations mémorielles, qu’elles soient minoritaires ou hégémoniques, c’est aussi questionner leur forme de transmission, entre des expressions considérées comme « subalternes » – car relevant de l’oralité – et des traditions savantes ayant recours à l’écrit. D’autres formes de narrations extra-verbales, notamment iconographiques, musicales et chorégraphiques gagneraient à faire l’objet d’un travail sur les transmissions mémorielles parallèles. L’expression poétique, littéraire et artistique de la mémoire des conflits peut ainsi côtoyer la mise en narration faite par des graffitis dans les centres urbains pendant la guerre, à l’image des murs d’Athènes ou de Barcelone remplis d’inscriptions à caractère politique, les caricatures circulant dans la presse clandestine, les chants macédoniens sans parole chantonnés face à la répression féroce de l’usage de la langue macédonienne par l’État grec. Un travail sur la forme de la narration mémorielle doit aussi s’accompagner d’une réflexion sur les fonctions de cette expression à niveau individuel et collectif.
 
Chercheurs associés au projet : Philippe Bazin (EHESS/IRIS), Marcel Courthiade (CREE), Thanassis Kalafatis (EMIAN – Université du Pirée), Vaggelis Karamanolakis (ASKI), Anna Katsigianni (Université de Patras), Irène Lagani (Panteion), Arghyro Paouri (CNRS), Ioanna Papathanassiou (EKKE), Frosa Pejoska-Bouchereau (Plidam, Inalco), Nicolas Pitsos (CREE, Bulac), Maro Thanopoulou (EKKE), Marie-Christine Varol (Cermom, Inalco).
 
Partenaires institutionnels : Plidam (Inalco), EHESS, Université Kapodistrienne d'Athènes, Bulac, Centre d'archives d'histoire sociale (ASKI, Athènes), Centre national de recherches en sciences sociales (EKKE, Athènes), Centre d’études sur les mouvements de jeunesse (EMIAN, Athènes).
 
Opérations de recherche envisagées : 
  • Un séminaire doctoral et de recherche dans la continuité du cycle de conférences sur les conflits et les crises dans les Balkans du xxe et du xxie siècle, déjà entamé cette année.          
  • Un colloque international avec publication sur Paroles d’exil, exil de la parole.
  • Un colloque sur la mémoire séfarade dans les Balkans. 
  • Organisation de tables rondes en collaboration avec nos partenaires institutionnels (avec publications dans Les Cahiers balkaniques).
  • Publication d’une série d’ouvrages sur des conflits dans les Balkans dans la collection « Méditerranée » dirigée par Joëlle Dalègre (questions chypriote, grecque, macédonienne).
  • Création d’un documentaire filmique portant sur les témoignages de conflits en partenariat avec le CNRS en la personne d’Arghyro Paouri.
  • Une exposition photographique à partir du travail de Philippe Bazin avec qui il existe déjà une collaboration dans le cadre du projet « Les non lieux de l’exil » (EHESS/IRIS) à partir de villages abandonnés depuis la fin de la guerre civile en Grèce. (Voir https://nle.hypotheses.org/3861)Un deuxième projet photographique sur les réfugiés de Lesbos verra le jour dans la continuité du travail photographique déjà exposé à l’Inalco par l’étudiante de la section de grec de l’Inalco et photographe Clara Villain. 


Projet 3.4. Les sociétés post-communistes face aux crises et aux risques en Eurasie


Responsables : Catherine Poujol (CREE), Jean Radvanyi (CREE), Sophie Hohmann (CREE), Laurent Coumel (CREE)

3.4.1. Crises et risques en Eurasie post-communiste

Responsables : Catherine Poujol, Jean Radvanyi, Sophie Hohmann
 
Le projet proposé ici est le prolongement, dans le domaine de la recherche pluridisciplinaire, de la formation « Gestion des crises sanitaires et sociales et des risques naturels en Eurasie, Asie du Sud-Est, Chine, Japon », mise en place en mai-juin 2012 par l’Inalco, l’IPGP et l’EHESP dans le cadre du programme PPE 2011 (Sorbonne Paris Cité).
Il se veut une réflexion transversale et pluridisciplinaire sur les crises qui touchent les sociétés postcommunistes en Eurasie. Il cherche à sensibiliser les chercheurs en SHS à des problématiques qui impliquent de créer de nouveaux outils linguistiques, informatiques, théoriques adaptés aux terrains de crises sur lesquels ils peuvent être amenés à intervenir. Si l’on a salué, dans un premier temps, le caractère pacifique de l’éclatement de l’URSS amenant la création de quinze nouveaux Etats indépendants, les conflits à retardement qui se sont manifestés dans cette aire géographique (au Caucase et en Asie centrale dès les années 1990, en Géorgie en 2008, et plus récemment en Ukraine) montrent que ce processus est loin d’être définitivement stabilisé. Par ailleurs, les mutations à l’œuvre, les implications multiples d’acteurs extérieurs à la région (Union européenne, Etats Unis, et de plus en plus, la Chine) amènent à réfléchir sur un espace plus large, incluant tout ou partie de l’Europe médiane ou orientale avec laquelle plusieurs des Etats postsoviétiques interfèrent.
L’équipe se propose de mettre en évidence les nouveaux risques à l’œuvre et leur éventuel développement en crises multiformes dans la totalité de l’espace postsoviétique, avec une attention particulière à l’Ukraine, à l’Asie centrale et au Caucase, mais entend également s’intéresser, à titre comparatif, aux espaces voisins, Europe médiane et Chine notamment, connaissant ou ayant connu un système communiste. On étudiera les risques politiques, économiques, démographiques, religieux et environnementaux qui sont à l’œuvre depuis plus de vingt ans dans cet espace disloqué mais toujours présent au moins dans les mentalités.
Le CREE étudie plusieurs zones présentant un potentiel conflictuel ethnique ou politique auquel s’ajoutent des risques environnementaux et sanitaires qui ne sont pas spécifiques (comme la gestion de l’eau dans des bassins traversés par de multiples frontières) mais sont susceptibles de prendre une dimension importante dans des régions comme la Crimée, l’Azerbaïdjan, la Caspienne, la zone d’essai nucléaire de Semipalatinsk. On prévoira des études de risques croisés ponctuelles, des supports de cartes géographiques dédiées aux problématiques étudiées. Dans le cadre de la transversalité du projet, on s’attachera à inclure aussi une dimension littéraire et artistique (par la littérature, le cinéma) comme miroir des crises, reflet d’une mémoire traumatisée mais volontiers instrumentalisée par les différents pouvoirs en place. On s’appuiera sur des entretiens semi-directifs réalisés auprès de témoins et acteurs (ancien.ne.s responsables, activistes du mouvement écologiste, journalistes, chercheur.e.s).
 
Chercheurs associés au projet : Laurent Coumel (CREE), Iryna Dmytrychyn (CREE), Sophie Hohmann (CREE), Katerina Kesa (CREE), Catherine Poujol (CREE), Jean Radvanyi (CREE), Taline Ter Minassian (CREE), Julien Vercueil (CREE), Sergueï Fediunin (doctorant CREE)
 
Principales collaborations :
projet CartOrient (CNRS UMR 7528 - Mondes iranien et indien) ; CERCEC (Centre d’études des mondes russe, caucasien et centre-européen, UMR 8083) ; Observatoire franco-russe de la Chambre de commerce franco-russe, Moscou ; Centre d’études franco-russe (CEFR, Moscou) ; Institut français d’études de l’Asie centrale (IFEAC, Bichkek) ; Institut de géographie de l’Académie des sciences de Russie ; Institut d’anthropologie de l’Académie des sciences de Russie.
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Un séminaire doctoral et de recherche
  • Organisation de tables rondes et de colloques en collaboration avec les centres de recherches et les Instituts français dans les pays concernés par nos recherches.
  • Développement d’une base de données et d’un site de cartographie (CartOrient) accessible sur internet
  • Développement d’un blog reflétant la production des participants, power points, billets d’analyse, liens commentés etc.
Autres réalisations prévues : Observatoire des États postsoviétiques
 
Plusieurs questions associées à cette problématique ont été abordées par l’Observatoire des États postsoviétiques, dirigé au sein du CREE par Catherine Poujol, Taline Ter Minassian et Jean Radvanyi. L’OEPS travaille à la recherche et l’analyse des processus de réorganisation régionale dans l’espace post-soviétique, à la veille médiatique de l’actualité politique, économique, géopolitique des États post-soviétiques. Il coordonne des activités scientifiques régulières et publie des ouvrages dont certains sont devenus de véritables outils pour comprendre la « transition post-soviétique ». L’OEPS poursuit un travail de veille et d’analyse sous la forme des « Petits déjeuners » consacrés à l’actualité politique, économique, géopolitique des États post-soviétiques. Sur le principe d’une veille médiatique, il s’agit d’inviter un expert à s’exprimer sur un sujet touchant à l’actualité États post-soviétiques. Organisés à un rythme régulier d’environ une fois tous les deux mois, ces petits déjeuners touchent un large public : milieu universitaire, experts et milieux économiques.
- Projet CartOrient (Caucase, Asie centrale, Iran) : un aspect à la fois pratique et analytique du projet consiste à développer la mise au point et l’enrichissement de la base de données cartographiques présentée dans le cadre du projet CartOrient, qui résulte d’une coopération entre l’Inalco et l’UMR Monde iranien du CNRS. Il s’agit d’offrir au public de chercheurs et au grand public un outil de connaissance et d’analyse cartographique sur l’ensemble régional constitué par le Caucase, l’Asie centrale et l’Iran. Ce projet intégrera un atlas du Caucase mis au point sous la direction de Jean Radvanyi dans le cadre du programme européen CASCADE (FP7). Les premiers résultats de ce programme seront disponibles dans le courant de l’année 2018 et l’ensemble de cette recherche sera poursuivi au cours du prochain quinquennal.
- Annuaire franco-russe OBSERVO : une autre réalisation de cette recherche est la participation de plusieurs enseignants chercheurs (Sophie Hohmann, Marlène Laruelle, Jean Radvanyi, Julien Vercueil) à l’annuaire, édité depuis 2013 en français et en russe, par la Chambre de commerce franco-russe. Jean Radvanyi y est par ailleurs responsable de la cartographie depuis la première édition.
 
Mots-clefs : Eurasie ; Europe médiane ; Europe orientale ; Russie ; Etats postsoviétiques ; géopolitique ; transition ; crise ; gestion des conflits ; gestion des risques ; renouveau religieux

3.4.2. Anthropocène en Russie-URSS

Responsable : Laurent Coumel

À l’est de l’Europe et dans l’ex-URSS, marqués par quarante ou soixante-dix ans de régimes dits communistes au XXe siècle, la question environnementale se pose avec des temporalités différentes de celles du monde occidental. La pression des sociétés sur les milieux et les ressources s’y inscrit là aussi dans le temps long de l’anthropocène, ère géologique dont l’humanité est devenue une force majeure : qu’on le fasse débuter avec l’âge industriel, entre la fin du XVIIIe et le milieu du XIXe siècle, ou avec l’accélération des dégradations écologiques et de leur prise en compte globale survenue après 1945. Mais alors que le relatif « tournant environnemental » des années 1960 et 1970 à l’Ouest a connu un équivalent beaucoup plus faible dans les institutions et les sphères publiques à l’Est, la catastrophe de Tchernobyl en 1986 a provoqué, quelques années plus tard, un premier moment de forte mobilisation verte : les ruptures politiques de 1989 en Europe centrale et orientale et la dislocation de l’Union soviétique en 1991 en sont pour partie le résultat. Dans les années 1990, les pays post-communistes ont connu des situations contrastées : renforcement de la législation environnementale mais affaiblissement des institutions chargées de la faire appliquer, essor parfois contrarié, voire réprimé des mouvements écologistes. En ce début de XXIe siècle, la question environnementale reprend force dans ces espaces, y compris ceux qui sont soumis à des régimes autoritaires. Des contestations liées, soit aux défis globaux (changement climatique), soit à la perception des risques (catastrophes amplifiées par l’action humaine), soit à des préoccupations locales, se déploient à nouveau, notamment via Internet et les réseaux sociaux.
Le projet « Anthropocène en Russie-URSS » vise à éclairer ce retour de la question environnementale dans l’ex-URSS des années 1950 à nos jours, dans une perspective pluri voire interdisciplinaire, en premier lieu en Russie (région des hauts de la Volga, lac Seliger, projet de dérivation des fleuves de Sibérie et de Russie du nord, etc.). Il interagit avec le sous-projet 3.4.1.

Chercheurs associés au projet : Iryna Dmytrychyn (CREE), Sophie Hohmann (CREE), Eric Le Bourhis (CREE), Adrien Nonjon (CREE), Jeanna Vassilioutchek-Mestre (CREE), Charlotte Marchina (IFRAE, INALCO), Marin Coudreau (CERCEC, CNRS), Jawad Daheur (CERCEC, CNRS), Marc Elie (CERCEC, CNRS), Marie-Hélène Mandrillon (CERCEC, CNRS), Perrine Poupin (Eur’Orbem, CNRS), Camille Robert-Boeuf (LADYSS, CNRS), Michel Dupuy (IHMC, ENS), Katja Bruisch (Trinity College, Dublin), Katja Doose (Université de Fribourg), Alexander Ananyev (Université de Tübingen), Benjamin Beuerle (DHI Moscou) Elena Kochetkova (Haute école d’économie, Saint-Pétersbourg), Julia Lajus (Haute école d’économie, Saint-Pétersbourg), Evgenij Gololobov (Université pédagogique de Sourgout)
 
Principaux partenaires institutionnels :
CERCEC, CEFR, DHI Moscou, HSE Saint-Pétersbourg
 
Réalisations :
  • Séminaire de M2 « Russie-URSS : approches pluridisciplinaires » (depuis 2020-2021)
  • Séminaire de recherche du CEFR à Moscou (en ligne) « Anthropocène en russe » (depuis février 2021)
  • Tables rondes de l’Observatoire des Etats post-soviétiques « 2020 : marée rouge dans l’Arctique russe » (juin et octobre 2020)
  • Série d’ateliers du site Politika (Tepsis, EHESS) « Anthropocène à l’Est » : premier atelier paru au printemps 2021 « 2020, une marée rouge en Sibérie »
  • Forum numérique « Mobilisations environnementales à l’Est : approches régionales et locales (1986-2020) » et projet de publication collective
  • Séminaire de recherche organisé avec Marc Elie pour le Centre d’études franco-russes à Moscou « Anthropocène à la russe » (en russe ; depuis février 2021)
  • Projet de livre sur Tchernobyl en URSS (2022)
  • Rédaction d’articles pour le projet Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe (Tchernobyl, tournant environnementale en URSS)
Mots-clefs : Anthropocène, Environnement, URSS, Russie, Arctique, Tchernobyl, catastrophes, pollution, mobilisations, écologie, contestation, aménagement hydraulique, territoires de l’eau.
 

Projet 3.5. Conflits et mutations dans les espaces européens et eurasiatiques


Responsable : Bruno Drweski (CREE)
 
La fin du bloc de l’Est a signifié la fin d’un système intégré traversé par des contradictions intérieures de plus en plus exacerbées qui ont poussé les élites produites par ce système à dissoudre les structures politiques et économiques existantes en même temps que plusieurs États multinationaux disparaissaient. Nous avions examiné la problématique de la rupture et de la continuité des élites après 1989/1991 lors d’un colloque « 1989 en Europe médiane : 20 ans après »  qui s’était tenu à l’Inalco et dont les principales contributions sont parues dans le volume 43-44 de la revue Slovo : Gagnants et perdants : une génération après …Le ‘post-communisme’ en Europe du Centre et de l’Est paru en 2014. L’héritage du système précédent est pourtant loin d’avoir disparu ce qui explique pourquoi aussi bien au niveau médiatique que scientifique, la notion d’espace post-soviétique ou post-socialiste continue à être utilisée de façon explicite ou implicite trente ans après le début du processus de désagrégation. Il est donc temps de rechercher les bases historiques, géopolitiques, culturelles et sociales des processus d’intégration régionales au niveau européen d’un côté, eurasiatique de l’autre, ainsi que les facteurs de tensions récurrentes qui traversent ces sociétés. Dans le but de répondre à la question non plus seulement des ruptures et des continuités sur le plan chronologique mais également sur le plan régional et géopolitique. Tensions qui se manifestent aujourd’hui d’un côté au sein de l’Union européenne entre plusieurs États ex-socialistes et ceux du noyau initial de l’Union européenne comme elles peuvent se manifester entre ces États et des États post-soviétiques ainsi que entre pays ayant adhéré à la CEI. Dans le but de répondre à la question : ces phénomènes témoignent-ils d’une problématique persistante commune à l’ensemble des anciens pays du Bloc de l’Est – et dans quelle mesure –, ou a-t-on affaire à une différenciation grandissante devant aboutir à terme à la disparition des concepts d’ « Europe centrale et orientale », « Europe de l’Est », « Eurasie », « espace post-socialiste » et/ou « post-soviétique » ? Quels groupes sociaux ou nationaux pourraient être intéressés à poursuivre les processus de rupture et lesquels pourraient chercher des voies de reconstruction d’une dynamique commune aux pays de la masse intérieure du continent eurasiatique ?
 
Chercheurs associés : Ana Bazac (philosophe, Université Polytechnique de Bucarest, Roumanie), Aurel T. Codoban (philosophe, Université Babeș-Bolyai, Cluj, Roumanie), Gracjan Cimek (géopolitologue, Directeur de l’Institut d’études internationales de l’Académie de Marine de guerre, Gdynia, Pologne), Sławomir Czapnik (politologue, Institut d’études européennes, Université d’Opole, Pologne), Michel Korinman (géopolitologue, Professeur émérite Sorbonne Université), Claude Karnoouh (philosophe du politique, Retraité CNRS, Bucarest, Roumanie), Alexandru Mamina (Institut Nicolae Iorga d'histoire, Académie Roumaine, Bucarest, Roumanie), Attila Melegh (Institut de recherche démographique, Budapest, Hongrie), Zijad Abou Saleh (sociologue, Université humaniste et sociale, Wrocław, Pologne), Jarosław Tomasiewicz (Institut d’histoire de l’Université de Silésie, Katowice, Pologne), Mariusz Turowski (Philosophe, Université de Wrocław, Pologne, Université de Bursa, Turquie).
 
Partenaires institutionnels : Académie de Marine de Guerre, Gdynia (Pologne), Université de Wrocław (Pologne).
 
Activités envisagées :
  • Organisation de tables rondes avec publication des travaux ;
  • Participation à colloques.

​Axe 4 - Identités en mouvement : autour de la "minorité"

Responsable : Dominique Samson

L’Axe « identités en mouvement » prolonge une réflexion initiée lors du précédent quinquennal autour de la problématique cruciale, en Europe centrale, orientale et en Eurasie, des minorités. Qu’elles soient de nature ethnique, confessionnelle ou sociale ; littéraire et artistique, à travers les minores, ou œuvres et auteurs exclus du mainstream culturel et de l’historiographie ; ou encore juridique, à partir essentiellement des témoignages oraux ou écrits des mineurs, elles demeurent encore trop souvent dans l’ombre de l’historiographie dominante. Dans une approche historique, anthropologique ou littéraire, le projet envisagé veut rendre compte de l’élaboration, de l’évolution et des pratiques de diverses identités dans les espaces supposés périphériques (Sibérie, Arctique, Bachkortostan) ou dans les récits littéraires à caractère (auto)biographique ou autofictionnels (Russie européenne, Roumanie, Moldavie), du xviiie au xxie siècle. Il s’intéresse également aux « effacées » de l’historiographie littéraire et culturelle : les écrivaines et les artistes femmes. Ce projet permet ainsi de rassembler des chercheurs de différentes disciplines autour de thématiques communes et singulières, nationales et locales.

En ce qui concerne les espaces « périphériques », l’un des projets développés rendra compte des voies identitaires et des stratégies des minorités autochtones des espaces sibérien, arctique et finno-ougrien, dans le contexte complexe de la Fédération de Russie : comment construire un renouveau religieux et transmettre les systèmes de connaissance et les langues vernaculaires ? Un autre projet est consacré à la production cinématographique sibérienne dont la diffusion est souvent restreinte aux frontières régionales. Peut-on ébaucher une histoire du spectacle cinématographique en milieu autochtone en examinant les différentes composantes du cinéma en tant qu’expérience globale : lieux et conditions de projection, films diffusés, publics et modalités de médiation ? Enfin, un projet s'intéresse aux minorités juives dans l'Europe centre-orientale.
En ce qui concerne l’espace littéraire, deux projets seront consacrés à la construction identitaire individuelle et au discours mémoriel à partir de l’étude de la création à caractère (auto)biographique et historiographique : l’« archipel noir » des femmes‐écrivains russes d’une part (autour de la question du « majeur » et du « mineur » en littérature), les mémoires et récits de l’enfance communiste en Roumanie et en Moldavie de l’autre.
 
Projets :

  • 4.1. Identités minoritaires  dans l’espace sibérien et finno-ougrien (Dominique Samson, Eva Toulouze)
  • 4.2. Cinéma et peuples autochtones dans l’espace sibérien (Caroline Damiens, Anna Leyloyan)
  • 4.3. L’ « archipel noir » des femmes écrivains et artistes russes (Catherine Géry)
  • 4.4. L’enfance communiste en Roumanie et en Moldavie : mémoires et récits (Catherine Durandin)
  • 4.5. Les minorités juives en Europe Centre-orientale (Arnaud Bikard, Anne Grynberg). 


4.1. Identités minoritaires  dans l’espace sibérien et finno-ougrien

Responsables : Dominique Samson (CREE), Eva Toulouze (CREE, IUF)
 
Lors du nouveau plan quinquennal à venir, il s’agira de continuer l’étude des relations entre le monde russe et les communautés autochtones à l’époque impériale, soviétique et « fédérale », que ce soit en Sibérie (sub)arctique ou au Bachkorskostan.
En ce qui concerne les Nénètses, Khantys et Mansis de Sibérie, après divers travaux sur les missions orthodoxes du xixe siècle et la résistance indigène à la soviétisation dans les années 1930, il s’agira notamment d’observer l’évolution, en milieu urbain et rural, du renouveau religieux (chamanisme, orthodoxie et Églises évangéliques) et des initiatives autochtones (création d’écoles expérimentales ou ethno-pédagogiques, utilisation des réseaux sociaux, valorisation des langues vernaculaires) face au patriotisme russe actuel. Des terrains permettront de continuer à recueillir la parole autochtone et notamment de collecter des récits de vie.
Pour le Bachkortostan, les recherches seront centrées sur les pratiques religieuses des Oudmourtes locaux, qu’elles se soient maintenues au fil du temps ou aient été réinvesties par les communautés depuis la fin de l’Union soviétique. Dans ce but, des travaux de terrain sont prévus pour étudier plus particulièrement les rituels et les prières dans la société villageoise oudmourte contemporaine.
 
Collaborations envisagées : Université d’État de Tomsk (Irina Nam, Andreï Filtchenko) ; Université d’État de Khanty-Mansiïsk (Tatiana Moldanova) ; l’Institut ob-ougrien de recherche appliquée de Khanty-Mansiïsk (Valentina Solovar, Evdokia Niomysova, Svetlana Popova) ; le complexe muséal I. S. Chemanovskiï de Salekhard ; les communautés autochtones elles-mêmes ; École Pratique des Hautes Études – section des sciences religieuses (Jean-Luc Lambert) ; Université de Tartu (Liivo Niglas, Nikolai Anisimov).
 
Réalisations attendues :
  • Séminaire de Master 2, journées d’études et/ou colloques, Journées finno-ougriennes ;
  • Participation à des séminaires, journées d'études et colloques internationaux, à des ouvrages et chapitres d’ouvrage ;
  • Publications, traductions ;
  • Publication des données collectées et d’ouvrages, notamment sur les rituels de Varkled-Bodja (2018), sur la culture oudmourte actuelle (2019), sur les prières oudmourtes (2021). 
Mots-clefs : Arctique sibérien ; Bachkorkostan ; interactions ; histoire culturelle ; anthropologie religieuse ; littérature ; récits de vie.
 

4.2. Cinéma et peuples autochtones

Responsables : Caroline Damiens (CREE), Anna Leyloyan (CREE)
 
Le projet vise à interroger les rapports du cinéma et de la question nationale dans l’espace multiethnique soviétique, en portant une attention particulière à la question de l’autochtonie. Il se compose de deux grands ensembles qui croisent les approches (culture visuelle, approche linguistique), les objets (modalités d’expression cinématographique et modalités de diffusion des films) et les aires géographiques (Sibérie, Caucase) dans une perspective pluridisciplinaire.

4.2.1 Cinéma et peuples autochtones dans l’espace sibérien et arctique

Responsable : Caroline Damiens

Depuis les années 2000, la Sibérie, et plus globalement la zone arctique, sont le lieu d’une intense production cinématographique, dont la diffusion est souvent restreinte aux frontières régionales. Mais, avant de poser la question (essentielle) du (des) cinéma(s) autochtone(s), il convient de s’intéresser à l’introduction du cinéma sur les terres peuplées par les autochtones, que ce soit par des activités de tournage ou de diffusion des films. Le premier volet de ce projet de recherches est d’ébaucher une histoire du spectacle cinématographique en milieu autochtone dans le contexte sibérien soviétique, peu exploré, en examinant les différentes composantes du cinéma en tant qu’expérience globale : lieux et conditions de projection, films diffusés, publics et modalités de médiation. Par ailleurs, historiquement, les « indigènes » ont longtemps été l’objet d’un regard qui se voulait soit ethnographique soit exotique. Un second objectif sera donc de documenter les relations entre l’ethnographie et le cinéma en contexte soviétique dans les espaces sibérien et arctique, en ouvrant la réflexion à d’autres aires géographiques comparables.
 
Chercheurs associés au projet :
Dmitry V. Arzyutov (KTH Royal Institute of Technology, Stockholm), Virginie Vaté (GSRL-CNRS), Ivan A. Golovnev (Institut d’histoire et d’archéologie, Ekaterinbourg), Lucien Clercq (EHESS – Université de Hokkaido), Morgan Corriou (université Paris-VIII).
 
Principales collaborations : Archives nationales de République Sakha (Iakoutie) ; Archives d’État du District autonome de Tchoukotka ; Centre du patrimoine audiovisuel de Iakoutie ; Musée d’ethnographie et d’anthropologie de l’Académie des sciences de Russie (Kunstkamera) ; Royal Anthropological Institute of Great-Britain and Ireland
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Journée d’étude ou colloque ;
  • Publications : monographie, articles, chapitres d’ouvrage collectif ;
  • Participations à des séminaires et colloques internationaux. 
Mots-clés : cinéma ; culture visuelle ; cinéma ethnographique ; histoire du spectacle cinématographique

4.2.2. Cinémas nationaux dans l’espace soviétique

Responsable : Anna Leyloyan

Ce projet vise à porter une réflexion sur la langue, le langage et le style dans la création cinématographique dans un espace multiculturel, multiethnique et multilingue.
Étude comparative des caractéristiques d’expression artistique dans un cadre de création « nationale dans sa forme et socialiste dans son contenu ». 
Le but est de mettre en évidence la portée de la langue (ou du dialecte) d’origine dans une œuvre cinématographique, mais également suivre l’évolution et la spécificité du langage propre au 7e art.  Sa capacité de dévoiler en guise d’appartenance nationale ou ethnique une riche toile de fond tissée par plusieurs éléments composant l’œuvre (langues, musique, folklore, ethnographie, histoire, religion, littérature, tradition orale) qui dépasse largement les limites de la forme. Suivre l’histoire de l’évolution de(s) cinéma(s) nationaux dans l’espace soviétique, comprendre comment « le silence », « le non dit » et le « le langage des symboles » deviennent de nouvelles formes d’expression universelle et la force du langage cinématographique.
Un second objectif est de suivre l’évolution et le développement de ces pratiques « bipolaires » de(s) cinéma(s) soviétique(s) sur l’exemple de création de cinéastes arméniens vers une véritable expression de la pensée et de la culture nationale et son développement.
 
Chercheurs associés au projet : Claire Mouradian, (CNRS, EHESS) ; Siranouch Galstyan, (Université d’État de Erevan) ; Hayk Hambartsumyan, (doctorant).
 
Principales collaborations : Archives nationales d'Arménie, Erevan ; Musée Paradjanov, Erevan ; Académie nationale des sciences de la République d'Arménie, Erevan ; Institut national du théâtre et du cinéma de Erevan.
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Journée d’étude et /ou colloque ;
  • Publications : articles, chapitres d’ouvrage collectif ;
  • Participations à des séminaires et colloques internationaux. 
Mots-clés : cinéma national ; cinéma arménien ; URSS ; Caucase.
 

4.3. L’ « Archipel noir » des femmes écrivains et artistes russes 

Responsable : Catherine Géry (CREE)
 

4.3.1. Femmes et canon littéraire en Russie (1760-1890)

Responsable : Catherine Géry

En lien avec le projet 6.2 « Penser autrement l’Histoire littéraire »
La littérature des femmes en Russie est jusqu’à la fin du xixe siècle la partie inapparente, atomisée et quasiment inexplorée d’un continent littéraire quant à lui extrêmement connu : la « grande » littérature russe des hommes – celle de Pouchkine-Gogol-Lermontov-Tourguéniev-Gontacharov-Dostoïevski-Tolstoï-Tchékhov. Les femmes qui entrent en littérature à partir des années 1760 ont été minorées, puis oubliées et éloignées de l’historiographie d’une modernité littéraire en Russie qu’elles ont pourtant contribué à façonner, et la narration du « grand siècle russe », le xixe siècle, ne les a toujours pas intégrées. Une lecture du xixe siècle « côté femmes », autrement dit non plus à partir du centre, mais à partir des marges, de la périphérie, du mineur (ou de ce qui est considéré comme tel) nous permettra de réévaluer la culture littéraire russe et la façon verticale, patrimoniale, déterministe, ethno-centrée et unisexe dont elle s’est construite à partir du xixe siècle, période symbolique entre toutes pour la formation du canon littéraire en Russie. La conquête par les femmes de la littérature russe n’est pas seulement la conquête du centre par la périphérie ou du majeur par le mineur, c’est aussi celle du normatif par le transgressif, et c’est la conquête de la culture classique (avec tout ce qu’elle suppose de codification, de contraintes, de contrôle et d’autocontrôle) par une forme libératrice de modernité formelle et thématique. Comment, à l’intérieur de la dialectique de la norme et de la marge, les créations/productions féminines, minorisées et/ou stigmatisées, ne cessent finalement de « travailler » – à leur manière – les productions canoniques ?

4.3.2. Le genre et les genres

Responsable : Catherine Géry

La marginalisation sociale des écrivaines, leur position spécifique à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des processus littéraires, leur long bannissement de la plupart des genres littéraires répertoriés par la tradition et inscrits dans le canon (en ce sens, la Théorie des trois styles de Lomonossov, remplacée au xixe siècle par une stricte hiérarchie des genres, était aussi une théorie de la partition masculin/féminin), leur cantonnement dans des formes d’écriture minorées ou considérées comme secondaires – les genres autobiographiques, épistolaires et, avant le romantisme, la poésie lyrique –, sont autant de facteurs qui ont paradoxalement permis aux femmes d’être des agents actifs de la modernité culturelle, qu’on considère cette dernière, à l’instar des formalistes russes, comme l’intrusion des « petits genres » dans le champ littéraire, ou qu’on envisage l’émergence dans la littérature de nouvelles formes d’individuation et de subjectivité (discours sur le corps, l’intime, la sexualité, etc.).
À travers l’analyse des phénomènes de marginalisation et de transgression dans les relations de la littérature féminine avec les mouvements littéraires dominants dans la Russie du xixe et du xxe siècles, il s’agira enfin de comprendre comment les femmes auteures, plus ou moins marginalisées, parviennent à transgresser certaines limites et normes littéraires et/ou socioculturelles (dans les genres autobiographiques et plus largement testimoniaux, par exemple), et comment d’autres acteurs de la vie littéraire réagissent à ces « interventions ».
 
Chercheurs associés au projet (4.3.1. et 4.3.2.) : Evelyne Enderlein (Université de Strasbourg), Natalia Pouchkareva (Institut d’ethnologie et d’anthropologie de l’Académie des sciences de Russie, Moscou), Galina Subbotina (CREE), Youlia Maritchik-Sioli (Université de Grenoble), Françoise Defarges (doctorante, CREE), Tomasz Krupa (doctorant CREE).
 
Principales collaborations : UMR Eur’Orbem, Sorbonne Université ; Académie des sciences de Russie ; Mnémosyne (association pour le développement de l’histoire des femmes et du genre), URL : http://www.mnemosyne.asso.fr/mnemosyne/; revue Gendernye issledovanija du centre ХЦГИ (URL http://kcgs.net.ua); РАИЖИ (Association des chercheurs russes en histoire des femmes).
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Un colloque (en 2020 ou 2021) suivi de la publication des actes ;
  • Un séminaire de Master 2 mis en place dès 2017-2018 ;
  • L’édition de traductions accompagnées d’un appareil scientifique des textes des écrivaines russes des années 1760-1890 (jamais traduites en français et pour certaines non rééditées en Russie depuis le xixe siècle), soit sous forme d’une - ou plusieurs - anthologies, soit en éditions séparées ;
  • Une monographie par Catherine Géry, prévue entre 2020 et 2022 : Femme, écrivain, russe – un « archipel noir ». 
Mots-clefs : littérature russe ; littérature féminine ; historiographie littéraire ; littérature des marges ; études de genre ; mineur/majeur.

4.3.3. Les Femmes artistes à l’Académie et dans l’espace public (Russie-Caucase : du milieu du xixe siècle au début du xxe siècle)

Responsable : Anna Leyloyan

L'objectif de ce projet de recherche est de mettre en lumière le rôle et la place des femmes dans le milieu culturel et politique de Russie et du Caucase à la fin de l’époque impériale, leurs engagements dans un milieu totalement masculin, leur combat pour la reconnaissance de leurs œuvres qui restent encore aujourd'hui majoritairement méconnu.
Paradoxalement, c'est l’Académie impériale des Arts de Saint-Pétersbourg qui ouvre la première ses portes aux femmes en leurs offrant plusieurs formations artistiques. Elles sont également présentes dans des associations artistiques et culturelles comme Les Ambulants, Le Monde de l’art, Société des artistes de Saint-Pétersbourg, etc. Quel est leur investissement ? À ce jour, très peu d'études sont consacrées à ces créatrices russes, tout domaine artistique confondu. Le bilan est encore plus maigre dans le Caucase qui offre un terrain de recherches inédites.
 
Chercheurs associés au projet : Claire Mouradian, (directrice de recherche, CNRS, EHESS), Hayarpie Papikyan, (docteure, Université Paris-Diderot), Paulette Coutant-Houbouyan, (docteure, EHESS), Rafik Santrossyan, (docteur, Université d’État des Langues et des sciences sociales V. Brusov).
 
Principales collaborations : Académie russe des beaux-arts, Saint-Pétersbourg ; Archives nationales d'Arménie, Erevan ; Galerie nationale d'Arménie, Erevan ; Académie nationale des sciences de la République d'Arménie, Erevan ; Académie nationale de Beaux-Arts d'Arménie, Erevan.
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Journée d’étude et /ou colloque ;
  • Publications : articles, chapitres d’ouvrages collectifs ;
  • Participations à des séminaires et colloques internationaux. 
Mots-clés : Académie impériale des Arts ; femmes artistes et sculptrices ; Russie impériale ; Caucase.

4.3.4. Médiatrices de la littérature russe du XIXe siècle à nos jours

Responsables : Olga Blinova et Catherine Géry
 
Ce projet est conçu dans le cadre du projet plus vaste « L’″archipel noir″ des femmes écrivains et artistes russes » porté par Catherine Géry. Il possède par ailleurs des liens étroits avec le projet 6.2. « Penser autrement l’Histoire littéraire ».
Le projet « Médiatrices » réunit des chercheuses (et potentiellement des chercheurs) qui s’intéressent à la participation des femmes éditrices et rédactrices, traductrices, critiques littéraires etc. dans le processus littéraire en Russie et en Union soviétique. Sa visée est de combler certaines lacunes, en contribuant notamment au retour de noms oubliés et en réfléchissant sur le concept de médiatrice et sur l’étendue possible de ce paradigme en littérature. Le projet cherche aussi à présenter un panorama des activités des médiatrices littéraires et à évaluer l’impact de leur participation sur la constitution du champ littéraire russe du XIXe siècle à nos jours. Ce laps de temps long et riche en événements politiques, sociaux et culturels permettra de mieux saisir l’évolution de ces activités. Ayant un fort potentiel d’influence sur le processus littéraire, aussi bien au niveau du choix des auteurs et des textes (à analyser, à traduire ou à éditer), qu’au niveau de celui des collaborateurs (dans le cas des éditrices et rédactrices des revues littéraires ou des revues ayant des rubriques littéraires), ces pratiques médiatrices, souvent minorées dans l’historiographie littéraire et dont les femmes furent les agents ignorés, ont pourtant façonné l’espace littéraire russe.
 
Chercheuses associées au projet : Catherine Géry (CREE), Olga Démidova (Université Pouchkine de Leningrad, Saint-Pétersbourg, Russie), Anna Shcherbakova (associée au CREE), Olga Biberson (post-doctorante au laboratoire SeDyL, Inalco), Anastassia Kouzmenko (Université pédagogique de Novossibirsk, Russie), Galina Subbotina (associée au CREE), Youlia Maritchik-Sioli (associée au CREE).
 
Opérations de recherche envisagées (et réalisée) :
  • Dans le cadre da l’axe 4 « Identités en mouvement : autour de la ″minorité″ », mise en place d’un séminaire doctoral à double tête portant sur les minorités ethniques et genrées, en collaboration avec Dominique Samson (année universitaire 2021-2022).
  • Journée d’études internationale « Les médiatrices de la littérature russe : femmes éditrices, rédactrices, traductrices et critiques littéraires au XIXe siècle » (12 mars 2021).
  • Journée d’études internationale « Les médiatrices et l’Âge d’argent de la littérature russe » (2022).
  • Journée d’études ou colloque international « Les médiatrices de l’époque soviétique » (2023)
  • Journée d’études internationale « Les médiatrices de l’époque post soviétique » (2024)
  • Publication des actes des journées d’études dans la revue Slovo.
  • Préparation et publication d’un Dictionnaire des médiatrices russes du XIXe siècle à nos jours.
  • Participations à des journées d’études, séminaires et colloques internationaux.
Mots-clefs : littérature russe ; littérature féminine ; historiographie littéraire ; médiatrices ; éditrices ; rédactrices ; traductrices ; femmes critiques littéraires ; correctrices ; femmes journalistes.

4.4. L’enfance communiste en Roumanie et en Moldavie : mémoires et récits

Responsables : Catherine Durandin (CREE), Cécile Folschweiller (CREE), Irina Gridan (CREE)
 
L’axe de recherches « Enfances communistes en Roumanie et Moldavie » a pour objectif  de mettre en lumière les éclats multiples de sociétés longtemps interprétées sous un angle statique. Nous nous inscrivons dans le courant de relecture plurielle de l’histoire des sociétés communistes tout en mesurant que cette attraction pour le pluriel est une sorte de mode des couleurs et des individualisations qui succède au noir et blanc des visions portées sur les années communistes durant la période de 1990 à 2000. Nos premières approches auprès de quelques amis, universitaires, ingénieurs ont fait apparaître des réticences, des blocages : parler d’enfances non malheureuses, banalement joyeuses, dans ce monde communiste d’hier, semble être perçu par certains comme la marque d’une défaillance face aux idéaux démocratiques supposant le malheur en cette phase du communisme. Il s'agit de collecter les témoignages d’enfances vécues dans les années et décennies suivant la seconde guerre mondiale tant en Roumanie qu’en Moldavie, en étant conscients que le  projet communiste soviétique a marqué différemment la Roumanie et la République socialiste de Moldavie. Un corpus de récits de vie publiés existe déjà (voir V. Tismăneanu, D. Lungu). Nous souhaitons élargir le cercle des témoins dans le temps et l’espace, toucher des générations diverses, les milieux ruraux et urbains, les milieux populaires et plus aisés, que cette aisance soit l’héritage d’une appartenance bourgeoise ou le fait de la promotion sociale rouge. Nous procéderons par construction d’un carnet d’adresses de contacts afin d’établir un réseau réactif et par établissement d'un questionnaire servant de grille souple autour des mémoires incontournables de la vie quotidienne en lien avec la vie politique, sociale et culturelle. Littéraires, philosophes, historiens, nous nous engageons à une narration : publication d’une sorte d’atlas des souvenirs d’enfances. Mais dans cette enquête, nous estimons nécessaire que cette démarche à dimension impressionniste prenne en compte les temporalités, les contextes historiques et politiques, l’encadrement législatif du statut et des droits de l’enfant.
 
Chercheurs associés au projet : Monica Iovanescu (Université de Craiova), Petru Negura (Université libre de Moldavie), Cristina Preutu (Université de Iași), Elena Prus (Université libre de Moldavie), Anda Radulescu (Université de Craiova), Monica Salvan (Musée de la littérature de Iași), Nora Sava (Université de Cluj), Florin Țurcanu (Université de Bucarest).
 
Partenariats envisagés : Université de Bucarest, ULIM (Université Libre de Moldavie), Musée de la littérature de Iași.
 
Activités de recherche et réalisations attendues :
  • Un séminaire de M1/M2 
  • Une journée d'étude
  • Une publication collective franco-roumaine 
Mots-clés : communisme ; enfance ; mémoire ; récits de vie ; histoire culturelle ; histoire sociale ; histoire orale ; Roumanie ; Moldavie

4.5. Les minorités juives en Europe Centre-orientale

Responsables: Arnaud Bikard, Anne Grynberg

Axe 5 - Dictionnaires, corpus, réseaux, changements linguistiques

Responsable : Svetlana Krylosova

L’axe 5 « Dictionnaires, corpus, réseaux. Changements linguistiques » est l’axe linguistique du CREE. Les enseignants-chercheurs travaillent sur différentes langues telles que le bulgare, l’estonien, le finnois, le russe, le tchèque, l’ukrainien, etc.
Sur la période 2019-2023, les chercheurs de l’axe 5 poursuivront leurs travaux en sociolinguistique, en linguistique du corpus, en terminologie, en lexicologie et en lexicographie, engagés lors du précédent quinquennat, en ouvrant de nouvelles perspectives.
Pour le projet 5.1, une équipe interdisciplinaire a été créée afin de lancer un nouvel axe de recherches sur l’étude formelle et informatisée du lexique russe. L’équipe du projet 5.2 poursuit son travail sur les changements linguistiques et l’étend à l’aspect sociolinguistique des changements dans les langues suite à l’emploi concomitant des variétés standardisées et non standardisées par les locuteurs dans une communauté linguistique. Le projet 5.3 réunit les chercheurs autour de la réalisation d’outils lexicographiques et de corpus unilingues ou bilingues. Les chercheurs du nouveau projet 5.4 mènent un travail inédit sur la description systématique de marqueurs discursifs ukrainiens.
Ainsi, outre les objectifs théoriques (réflexions sur la sémantique, la standardisation des langues, le processus de modification linguistique), les chercheurs de l’axe 5 se fixent également l’objectif descriptif suivant : créer de nouvelles ressources lexicographiques (dictionnaires, réseaux lexicaux) et des corpus parallèles qui pourraient être utilisés non seulement pour l’étude linguistique elle-même, mais aussi comme support pour l’enseignement de nos langues ainsi que pour le traitement automatique des langues.
La réalisation de ces projets de long terme est possible grâce à l’établissement de partenariats avec d’autres équipes de recherches de l’Inalco (CERMOM, ERTIM, Plidam) mais également avec des partenariats nationaux (ATILF CNRS, Université Lyon-2, Université de Strasbourg, etc.) et internationaux (Université d’Helsinki, Université de Kyiv,  Université de Sofia, Université de Montréal, etc.).
Les projets de l’axe 5 étant complémentaires, les chercheurs des quatre projets prévoient de travailler ensemble à l’occasion de la préparation des journées d’études, des colloques, des codirections des thèses de Doctorat et des mémoires de Master.
 
Projets :

5.1. Lexicologie explicative et combinatoire du russe selon l'approche des réseaux lexicaux

Responsables : Vincent Bénet (CREE, CEFR), Svetlana Krylosova (CREE)
 
Le projet Lexicologie Explicative et Combinatoire du Russe selon l’approche des Réseaux lexicaux (LEC-ru) a pour objectif de constituer à l’INALCO une équipe spécialisée dans l’étude formelle et informatisée du lexique de la langue russe. Les activités de l’équipe LEC-ru possèdent deux caractéristiques principales. Premièrement, elles se situent dans un cadre théorique et descriptif appelé Lexicologie Explicative et Combinatoire, qui permet de formaliser de façon rigoureuse les descriptions lexicales et qui s’insère dans une approche globale de l’étude de la langue dans tous ses modules de fonctionnement — sémantique, syntaxe, morphologie et phonétique. Une telle approche met aussi tout particulièrement l’accent sur l’étude et la modélisation de la phraséologie lexicale (locutions et collocations). Deuxièmement, l’activité de description du lexique russe s’appuie sur le développement d’un réseau lexical de grande taille (Réseau Lexical du russe, RL-ru). Un tel réseau est une représentation du lexique où les mots sont interconnectés par un système normalisé de relations paradigmatiques et syntagmatiques explicitement décrites. Il s’agit d’une structure de représentation particulièrement adaptée aux exploitations pédagogiques (enseignement du russe langue étrangère, notamment) et au traitement automatique de la langue.
 
Le projet s’inscrit dans le cadre de la convention signée entre l’Inalco et le CNRS (laboratoire Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française) avec la participation de l’Observatoire de linguistique Sens-Texte de l’Université de Montréal.
 
Chercheurs associés au projet : Elena Akborisova Da Silva (Plidam, Inalco), Vincent Bénet (CREE & CEFR), Nikolaï Chepurnykh (ATILF, CNRS, Université de Lorraine),  Tomara Gotkova (ATILF, CNRS, Université de Lorraine), Lidia Iordanskaja (OLST, Université de Montréal), Angelina Biktchourina (CREE), Lidia Kolzoun (ATILF — CNRS & CREE, doctorante sous la codirection d’Alain Polguère et de Svetlana Krylosova), Svetlana Krylosova (CREE), François Lareau (OLST, Université de Montréal), Igor Meľčuk (OLST, Université de Montréal), Polina Mikhel (ATILF, CNRS, Université de Lorraine), Alain Polguère (ATILF, CNRS, Université de Lorraine), Natalya Shevchenko (CRTT, Université Lyon-II & CREE).  

Principales collaborations : ATILF - CNRS (Université de Lorraine), OLST, Université de Montréal.
 
Opérations de recherche envisagées :
  • construction d’un Réseau lexical du russe qui sera diffusé librement auprès de la communauté scientifique (responsable Svetlana Krylosova) ;
  • mise en place de projets satellites exploitant les données de ce réseau, notamment le projet sur des termes d’adresse (responsable Angelina Biktchourina) ; 
  • établissement de partenariats nationaux et internationaux en lexicologie dans ses applications (séminaires et séances de travail réguliers à l’Inalco, à l’ATILF-CNRS et à l’OLST – Université de Montréal) (Svetlana Krylosova) ;
  • formation d’étudiants en lexicologie explicative et combinatoire, co-encadrement des mémoires de master, codirection des thèses de doctorat (Vincent Bénet & Svetlana Krylosova) ;
  • colloque international « Lexique et corps humain », juin 2021, (responsable scientifique Svetlana Krylosova, avec la participation des chercheurs du projet 5.2 Snejana Gadjeva & Gueorgui Armianov) ;
  • colloque international sur la lexicologie / la terminologie / les réseaux lexicaux, avril 2023 (responsables Angelina Biktchourina  & Svetlana Krylosova) ;
  • journée d’études sur les outils informatiques et l’enseignement, 2022 (responsables Lidia Kolzoun, projet 5.1 & Olena Saint-Joanis, projet 5.3) ;
  • participation à des séminaires doctoraux, des journées d’études et des colloques internationaux, publications. 
Mots-clefs : théorie « Sens — Texte » ; Lexicologie Explicative et Combinatoire ; langue russe ; Réseau lexical ; phraséologie ; terminologie.
 

5.2. Changements linguistiques internes et externes : similitudes et divergences

Responsables : Snejana Gadjeva (CREE), Gueorgui Armianov (CREE)
 
Le projet vise à réunir des chercheurs qui étudient des changements dans tous les domaines des langues en les associant à des processus d’évolution observés à des périodes données de l’histoire des sociétés qui les parlent. Ces changements linguistiques sont le résultat de différentes mutations sociales et étatiques marquées par un renoncement à des réalités du passé et une adoption de nouvelles formes d’expression langagière.
 
L’originalité du projet consiste en l’analyse de données linguistiques contemporaines, recueillies lors d’enquêtes de terrain ou tirées de corpus inédits. La problématique abordée est investie grâce à une approche sociolinguistique, aussi bien en synchronie qu’en diachronie, qui vise à faire le lien entre les productions proprement linguistiques et les contextes sociaux dans lesquelles ils se manifestent. Une attention particulière est portée aussi bien sur l’interaction entre langue standard et variétés non-standards (sociolectes, dialectes) que sur les interférences entre des langues parlées au sein de communautés bilingues et plurilingues de nos jours.
 
La variété des contextes sociaux dans lesquelles se manifestent les pratiques linguistiques étudiées donne la possibilité, d’un côté, de définir des facteurs externes spécifiques motivant les changements linguistiques au sein d’une communauté. Cette diversité de situations permet, d’un autre côté, de croiser différentes données linguistiques (langues slaves, balkaniques, turc, arabe, hébreu et langues juives) afin de démontrer l’existence d’une dynamique de transformation commune à plusieurs sociétés, par ailleurs rattachées à des espaces géopolitiques (européen, balkanique, méditerranéen) et historiques distincts (post-ottoman, post-austro-hongrois, postsoviétique).
 
Le projet s’inscrit dans la continuité des recherches menées en collaboration entre deux centres de recherches de l’Inalco (le CREE et le CERMOM) et un groupe de recherches (le GEO) de l’Université de Strasbourg et entamées lors du précédent quinquennat.
 
Chercheurs associés au projet : Georgui Armianov (CREE), Angelina Biktchourina (CREE),  Oleg Chinkarouk (CREE), Julien Dufour (GEO, Université de Strasbourg), Snejana Gadjeva (CREE), Marie-Aimée Germanos (CERMOM, Inalco), Svetlana Krylosova (CREE), Marijana Petrovic (Lacito, CNRS & Inalco), Ilona Sinzelle-Poňavičová (doctorante CREE),  Janna Vassiliotchek (CREE), Marie-Christine Bornes Varol (CERMOM, Inalco), Krassimira Aleksova (Université de Sofia Saint Clément d’Ohrid). 
 
Principales collaborations : Centre de recherches Moyen-Orient Méditerranée (CERMOM, Inalco), Groupe d’études slaves, orientales et néohelléniques (GEO, Université de Strasbourg), Université de Sofia Saint Clément d’Ohrid, International Sociolinguistic Society in Sofia (INSOLISO), Université d’Etat de Belarus’ (Minsk, Belarus’).
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Journées d'études ou un colloque (en 2020 ou 2021) suivis de la publication des actes ;
  • publication d’un volume thématique de la revue Slovo, décembre 2021 (dir. Snejana Gadjeva & Svetlana Krylosova) ;
  • séminaire doctoral Standard et non standard dans les langues de l’Europe médiane, destiné aux doctorants et aux étudiants de master (responsable Gueorgui Armianov, avec la participation des chercheurs des projets 5.1, 5.3, 5.4 : Angelina Biktchourina, Antoine Chalvin, Oleg Chinkarouk, Snejana Gadjeva,  Ilona Sinzelle-Poňavičová, Janna Vassilioutchek et des chercheurs d’autres équipes de l’Inalco (Plidam, Sedyl)) ;
  • participation annuelle à plusieurs séminaires collectifs du master Sciences du Langage : Linguistique des langues balkaniques ; Questions de grammaire dans l’aire finno-balto-slave ; Méthodes en dialectologie : théorie et pratique ; Textes. Linguistique. Traduction (Gueorgui Armianov, Oleg Chinkarouk, Snejana Gadjeva, Svetlana Krylosova & Janna Vassilioutchek) ;
  • Participation à des journées d’études et des colloques internationaux ;
  • participation aux Débats du CREE (Gueorgui Armianov, Snejana Gadjeva & Janna Vassilioutchek).
Mots-clefs : changements linguistiques ; changements sociaux ; dynamique sociolinguistique ; variétés standards / non-standards ; linguistique de corpus.
 

5.3. Corpus et, dictionnaires et outils pédagogiques

Responsable : Antoine Chalvin (CREE)
 
Ce projet vise à constituer un espace de coopération pour les enseignants-chercheurs qui, au sein du CREE, travaillent à la réalisation d’outils lexicographiques, pédagogiques ou de corpus bilingues, ainsi qu’à l’analyse de ces outils et de leurs modalités d’élaboration ou d’utilisation. Le projet favorise les échanges d’expériences, la diffusion des bonnes pratiques et la familiarisation avec les outils informatiques pertinents pour la réalisation de dictionnaires et de corpus. La réflexion menée dans le cadre du projet s’intéresse également aux nouvelles pratiques de lexicographie collaborative (dictionnaires collaboratifs tels que Wiktionnaire), en analysant leur spécificité par rapport à la lexicographie traditionnelle (comparaison des dictionnaires collaboratifs avec les dictionnaires académiques en utilisant les ressources offertes par le traitement automatique des langues). Les échanges d’expériences et la réflexion collective prendront la forme de journées d’étude associant des chercheurs extérieurs.

Chercheurs associés au projet : Gueorgui Armianov (CREE), Vincent Bénet (CREE & CEFR), Antoine Chalvin (CREE), Oleg Chinkarouk (CREE), Iryna Dmytrychyn (CREE), Kaja Dolar (CREE), Snejana Gadjeva (CREE), Madis Jürviste (Association franco-estonienne de lexicographie, Tartu), Heete Sahkai (Institut de la langue estonienne, Tallinn), Natalya Shevchenko (CREE & CRTT, Lyon-II 2), Olena Saint-Joanis (ELLIAD, Univ. Franche-Comté), Janna Vassilioutchek (CREE), Marie Vrinat-Nikolov (CREE).
 
Réalisations envisagées :
  • Journées d’étude sur les pratiques lexicographiques ;
  • participation au projet international « Réseau de recherches sur les ressources lexicales collaboratives » (Kaja Dolar, Antoine Chalvin, Marie Steffens) ;
  • étiquetage sémantique du dictionnaire électronique russe sur le logiciel Nooj : implantation de balises sémantiques hiérarchisées sur la base du dictionnaire de Tuzov (responsable Vincent Bénet) ;
  • publication de l’ouvrage collectif Marques de registre dans les dictionnaires monolingues et bilingues, Gueorgui Armianov (dir.), Inalco presses, 2020 ;
    poursuite du Dictionnaire des verbes bulgares (Marie Vrinat-Nikolov, Gueorgui Armianov, Snejana Gadjeva) ;
  • deuxième étape/volume du même projet : Dictionnaire des noms et des adverbes bulgares et tableaux grammaticaux - 2021 (responsables Gueorgui Armianov & Snejana Gadjeva) ;
  • Dictionnaire de l’argot bulgare, nouvelle édition élargie et remaniée prévue pour 2021 (Gueorgui Armianov) ;
  • développement du corpus parallèle finnois-français (Antoine Chalvin), en partenariat avec l’équipe ERTIM de l’INALCO, partenariat envisagé avec l’université de Helsinki
  • poursuite du Grand dictionnaire estonien-français (Antoine Chalvin, Madis Jürviste, Heete Sahkai), en partenariat avec l’Association franco-estonienne de lexicographie (AFEL, Tartu, Estonie), l’Institut de la langue estonienne (EKI, Tallinn, Estonie) et le Centre estonien de ressources linguistiques (EKK, Tallinn) ;
  • méthode d’ukrainien pour les débutants (Iryna Dmytrychyn, Oleg Chinkarouk, Olena Saint-Joanis et Natalya Shevchenko) ;
  • méthode de bélarussien pour les débutants (Janna Vassilioutchek) ;
  • Méthode de bulgare, éd. Assimil, 2020 (Marie Vrinat-Nikolov, Snejana Gadjeva).
Mots-clefs : lexicographie, dictionnaires, corpus parallèles, étiquetage sémantique, apprentissage des langues, argot, bulgare, estonien, finnois, russe.

5.4 Les marqueurs discursifs en ukrainien 

Responsable: Oleg Chinkarouk (CREE)

Il s'agit de la description systématique d’une trentaine de marqueurs discursifs (notés MD) ukrainiens. Les MD sont les unités de langue n’ayant pas de denotatum au sens général du terme ; comme leur signification ne comporte pas d’éléments stables et concrets, elles ne peuvent être étudiées qu’à travers leur usage dans le discours. Leur deuxième propriété : elles établissent un rapport entre deux (ou plus) composantes du discours, en assurant sa cohésion. Cela n’implique pas que les MD se trouvent à la périphérie du système lexical. Mais leurs propriétés compliquent leur description par le biais des méthodes traditionnelles sémantiques. Nous étudierons l’interaction entre le sémantisme propre des MD et le contexte dans lequel ils figurent. Cette interaction peut donner lieu à différents types de variation de leur signification qui seront étudiés en détail. Une telle étude des MD demandera la mise en place d’un métalangage spécifique permettant leur description. Un classement des MD en fonction de leurs propriétés sémantiques pourra être envisagé.
C'est là un sujet absolument inédit dans les linguistique et grammaire ukrainiennes.
Il présente, d’une part, une utilité scientifique et, d’autre part, pédagogique, directement liée à l’enseignement de l’ukrainien comme langue étrangère.

Réalisations envisagées:
Une (ou des) journée(s) d’étude au fur et à mesure de l’avancée des travaux.
 Publication d’un ouvrage sur les MD ukrainiens.

Partenariats:
Projet de recherche franco-ukrainien en partenariat avec l'Université de Kyiv, Iryna Aribzhanova (Institut de Philologie, Université de Kyiv)

Axe 6 – Penser et traduire les littératures

Responsable : Marie Vrinat-Nikolov

L’axe 6 « Penser et traduire les littératures » est un axe disciplinaire et transaréal, qui problématise  le fait  littéraire en l'envisageant sous plusieurs approches - sur la longue durée ou dans sa contemporanéité, dans une perspective transnationale ou régionale :

  1. une approche comparative transnationale par la traduction (dans ses visées théorique, critique, historique et pratique) qui est au cœur des phénomènes de transferts et de circulations littéraires (projet 6.1 qui prolonge les travaux menés en 2014-2018) ;
  2. le questionnement de l'historiographie littéraire et les enjeux de renouvellement qui s'offrent tout particulièrement lorsqu'on étudie des littératures « mineures » ou « périphériques » (projet 6.2 qui prolonge, lui aussi, les travaux menés en 2014-2018) : enjeux de périodisation, de désacralisation/déconstruction des canons nationaux dans une perspective décentrée, régionale ou transnationale, interrogation de catégories occidentales plaquées sur d'autres histoires littéraires, intérêt aux marges des canons (langues ignorées, femmes écrivaines,  etc.) .
  3. des approches régionales/nationales (projet 6.3) axées sur la modernité et la contemporanéité, des genres particuliers (théâtre, roman policier).

L’axe s’appuie sur le groupe PALM (Penser Autrement les Littératures du Monde) qui fédère depuis plusieurs années les enseignants-chercheurs en littérature de l’Inalco et a noué de nombreux contacts avec des chercheurs d’autres centres de recherches de l’Inalco (CERLOM, CeERMOM, LACNAD) ou extérieurs, nationaux et internationaux.
 
Des synergies pourront se présenter avec l'axe 1 « Patrimoines et héritages » (projets 1.1 et 1.3), l'axe 4 « Identités en mouvement » (projet 4.3).
 
Projets :

  • 6.1. Traduire les littératures : théorie, critique, histoire et pratique (Pauline Fournier, Marie Vrinat-Nikolov)
  • 6.2. Penser autrement l’histoire littéraire : les mythes nationaux, les canons et les minores revisités au XXIe siècle (Piotr Bilos, Catherine Géry, Marie Vrinat-Nikolov)
  • 6.3. L’évolution contemporaine du roman policier après 1989 (Piotr Bilos)

6.1. Traduire les littératures : théorie, critique, histoire et pratique

Responsables : Pauline Fournier, Marie Vrinat-Nikolov

La réflexion menée sur la théorie, la critique, l'histoire et la pratique de la traduction est fondamentale pour un établissement comme l'INALCO, riche de ses 101 langues et littératures du monde, qui demeurent pour la plupart encore méconnues ou ignorées des chercheurs. Elle s'accompagne de la formation des étudiants et d'actions auprès du grand public (participation à des lectures, rencontres, tables rondes, festivals, etc.). Nous entendons donc la poursuivre en 2019-2024 en la déclinant en deux volets :

6.1.1 Comment fonder et penser une critique de la traduction ?

Responsables : Marie Vrinat-Nikolov (CREE), et Alexis Nouss (AMU/ Chaire Exil et migration de la FMSH)

Notre projet a l'ambition d'établir non seulement un dispositif critique applicable à l’activité traductive, mais aussi une théorie du savoir fondée par la traduction : une « raison traductionnelle » (Alexis Nouss) qui puisse être un « modèle » critique. Il s'appuie sur :
Un constat paraxoxal : alors que la France est le pays occidental qui publie le plus grand nombre de traductions, malgré la multiplication des émissions, ouvrages, colloques, actions de formation sur la traduction, il n'y a pas actuellement de véritable critique de la traduction. Or, sans pensée critique, il n'est pas de pensée théorique, sans pensée théorique, il n'est pas de pratique qui vaille.
Une conviction : il y a urgence, pour nos sociétés, à considérer autrement identité et altérité aujourd'hui, dans nos sociétés mondialisées qui doivent faire face à la radicalisation et aux replis identitaires ; il y a donc nécessité et urgence de renouveler la pensée critique de la traduction dans une direction dialogique et de travail de l’altérité. Nous nous intéresserons donc aux implications philosophiques et politiques de la traduction.
 
Chercheurs associés au projet : Arnaud Bikard (CREE, CERMOM), Mourad Yelles (LACNAD), Tiphaine Samoyault (Paris-III, Sorbonne-nouvelle), Arno Renken (Haute École des arts de Berne, Suisse), Claire Placial (Université de Lorraine), Lambert Barthélémy (Université de Poitiers).

Principales collaborations : Aix-Marseille Université

Opérations de recherche et de valorisation envisagées :
Un séminaire doctoral INALCO/Aix/Paris-III (5 séances par année) alliant « atelier de réflexion » et formation à la recherche. des chercheurs reconnus (Barbarin Cassin, Martin Tueff, Camille de Tolédo et autres) seront invités à ce séminaire.
Publications collectives et enregistrement vidéo des séances publiés sur le carnet critiquetrad.hypotheses.org
Conférences, participations à des séminaires, colloques, journées d'étude, salons du livre et festivals littéraires 

Mots clés : critique, critique de la traduction, philosophie de la traduction, politique de la traduction, altérité.

6.1.2. Circulation et métissages des genres et des formes par la traduction.

Responsables : Marie Vrinat-Nikolov (CREE), Timour Muhidine (CERMOM), Mourad Yelles (LACNAD), Etienne Naveau (CERLOM).

L'un des apports majeurs de l'histoire culturelle et de l'étude des Transferts culturels à la réflexion sur les circulations littéraires est d'inviter non plus à penser en termes «d'influences » exercées par des cultures réputées « centrales » (occidentales) sur des cultures considérées comme « périphériques », ni en termes « d'identités nationales » plus ou moins stables et fermées, mais à considérer les aires culturelles comme des lieux de passage ouverts aux dynamiques et aux contacts transnationaux. Si les notions de « centre » et de « périphéries » fonctionnent lorsqu'il s'agit d'observer les luttes pour acquérir légitimité et consécration au sein du champ littéraire mondial, elle est à relativiser lorsqu'on s'intéresse aux dynamiques des circulations et des échanges entre acteurs, idées et textes, qui se font dans des directions multiples.
 
L'objectif des recherches impliquées par cet axe est donc triple :
  1. On tentera une « cartographie » spatiale et temporelle des textes qui ont circulé par la traduction dans le monde, notamment les « grands textes voyageurs » qui sont souvent, aussi, les « grands textes fondateurs » convoqués dans la construction des nations ou appelés à jouer un rôle de premier plan dans l’émergence ou l’enrichissement des corpus des littératures « nationales ».
  2. On s'intéressera aux phénomènes de transformations/réappropriations/émancipation/métissages par la traduction, puisque, on le sait, « transférer, ce n'est pas transporter, mais plutôt métamorphoser (M. Espagne) ».
  3. On n'oubliera pas l'importance des médiateurs culturels : traducteurs ou écrivains-traducteurs, éditeurs, enseignants, mécènes, etc.
Que l’on pense à la traduction des Mille et une Nuits, Kalila et Dimna, les Maqamât, La Vie d'Alexandre, au Moyen Age, mais aussi, plus tard, à celles des Aventures de Télémaque, Paul et Virginie, L’Avare, Le Petit Prince, L'Odyssée, etc., on a chaque fois affaire à des exemples de configurations formelles (littéraires) et imaginaires (en lien avec des représentations collectives) qui ont exercé un effet d’attraction, voire de mimétisme tout à fait remarquable.
Répondant ainsi à des propositions intellectuelles et artistiques impliquant des postures relevant de phénomène de métissage culturel, à différentes époques et en différents lieux, des élites « nationales » (ou plutôt « locales » car nous aborderons souvent le cas d'époques pré-nationales) souvent inscrites dans des circuits et réseaux « transnationaux » ont ainsi pu sensibiliser des publics très différents à des problématiques, à des genres et à des formes jusque-là inconnues.
 
Chercheurs associés au projet : Arnaud Bikard (CREE, CERMOM), Antoine Chalvin (CREE, littératures estonienne et finnoise), James Theeraphong (CERLOM, littérature siamoise), Etienne Naveau (CERLOM, littérature indonésienne), Jovanka Šotolova (Université Charles de Prague), Marzena Chrobak (Université Jagellonne, Cracovie), Ildiko Jozan (ELTE, Budapest), Sherry Simon (Université Concordia, Montréal), Katarina Bednarova (Université de Bratislava), Nike Pokorn (University of Ljubljana), Eriona Tartari (Institut national de la recherche, Tirana).
 
 Opérations de recherche envisagées :
  • Un séminaire de master
  • Un colloque
  • Une journée d'étude 
Mots clés : transferts culturels par la traduction, histoire de la traduction, médiation par la traduction, métissage culturel, cartographie de textes voyageurs
  

6.2. Penser autrement l’histoire littéraire : les mythes nationaux, les canons et les minores revisités au XXIe siècle

Responsables : Piotr Bilos (CREE), Catherine Géry (CREE), Marie Vrinat-Nikolov (CREE).
 
Ce projet réunit des chercheurs désireux de participer au renouvellement de l’historiographie littéraire initié dans les dernières décennies du XXe siècle dans une perspective transnationale et transdisciplinaire, afin d’élaborer la méthodologie d’une histoire des littératures reposant sur une autre périodisation que la chronologie historique, une histoire des littératures qui ne pratique ni l’hagiographie (les grands auteurs), ni l’anthologie (les grandes œuvres), une histoire des littératures qui se positionne contre le déterminisme du Grand Récit (national ou autre), une histoire des littératures susceptible d’interroger les œuvres, événements, acteurs rejetés hors du canon, minorés et oubliés ou, à l’inverse, sanctifiés et mythifiés par les diverses institutions littéraires. Une histoire des littératures qui analyse les processus de commémoration, de périodisation, de hiérarchisation des phénomènes littéraires, qui évalue la place et la fonction des médiateurs (éditeurs, critiques, universitaires, enseignants… mais aussi librairies et bibliothèques) dans la transmission des textes. Une histoire des littératures attentive non seulement à l’historicité, mais aussi à la socialité, aux institutionnalisations et aux circulations. Une histoire des littératures horizontale (les transferts et le dialogue des œuvres entre elles) et non plus verticale (les « influences » ou le désir de renouvellement des formes théorisé par les formalistes russes par exemple).
 
Dans plusieurs des cultures dites « orientales »  étudiées à l'INALCO, des chercheurs et des universitaires mettent déjà en cause, dans leurs cours, leurs séminaires ou leurs travaux scientifiques, certains aspects du canon littéraire et des mythes nationaux, tentent de donner aux femmes écrivaines la place qui leur revient et qui, jusqu’à présent, ne leur a pas été reconnue, de définir la place des littératures « migrantes » (diaspora, exil) au sein du canon national, de proposer un autre rapport entre le thématique et le chronologique, de montrer l’importance du contexte et du co-texte. Enfin et surtout, ils soumettent à une évaluation constante le concept de « littérature nationale » à l’aide de différents paramètres (le métissage et l’hybridation, les tensions individuel/collectif, identité/altérité, les rapports dominant/dominé ou majeur/mineur). Depuis 2013, un séminaire transversal et disciplinaire de Master intitulé « Ecrire/réécrire les histoires littéraires “nationales” »  réunit une partie de ces chercheurs en littérature de l’INALCO, complété, depuis 2017, par un séminaire doctoral.
 
Chercheurs associés : Antoine Chalvin (CREE, littérature finlandaise et des pays baltes), Françoise Robin (ASIES, littérature tibétaine), Pauline Fournier (CREE, littérature slovène), Cécile Folschweiller (CREE, littérature roumaine), Etienne Naveau (CERLOM, littérature indonésienne), Timour Muhidine (CERMOM, littérature turque), Mourad Yelles (LACNAD, littératures maghrébines), Alexandre Prstojevic (CERLOM, littératures serbe et croate), Julie Duvigneau (CERLOM, littérature persane), Iryna Dmytrychyn (CREE, littérature ukrainienne), Catherine Servant (CREE, littérature tchèque), Philippe Benoît (CERLOM, littératures d'Inde), Eun-Jin Jeong (CERLOM, littérature coréenne), Galin Tihanov (Queen Mary's University of London), Dessislava Lilova (Université Saint-Clément d'Ohrid, Sofia), Eriona Tartari (National Research Institutes of Linguistics and Literature, Tirana), Gun-Britt Kohler, département de slavistique, université d'Oldenburg), Pavel Navumenka (université de Minsk), Elena Gueorguieva (doctorante CREE), Thibault Deleixhe (doctorant CREE).
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Un séminaire de master 1 et 2 (déjà existant)
  • Un séminaire doctoral (déjà existant)/enseignant-chercheur/emmanuel-demadre
  • Plusieurs participations à des séminaires, colloques et journées d'études internationaux et à des ouvrages
  • Un numéro de la revue Slovo coordonné par Marie Vrinat-Nikolov 
Mots clefs : historiographie littéraire, littératures orientales, littératures nationales, transferts, canon littéraire, littératures migrantes, littératures mineures, littérature-monde
 

6.3. L’évolution contemporaine du roman policier après 1989

Responsable : Piotr Bilos (CREE)
 
Roman policier, polars, roman noir, d’espionnage, thriller, mais aussi « Detective story » et « crime story », la littérature de genre dédiée aux affaires criminelles suscite des complexités terminologiques (comme le prouve la typologie élaborée par T. Todorov).
Ce qui définirait les « fictions policières » serait donc leur « objet », l’activité criminelle sous toutes ses formes , laquelle entraîne une réaction de la part des forces de l’ordre (les policiers) : le meurtre, mais aussi le crime organisé ou non, les vols, les fraudes, les détournements de fonds, les enlèvements, les empoisonnements... Mais Todorov l’a bien montré : l’objet (la fable) est indissociable du « sujet » (selon les formalistes), de la façon de le raconter. Or aujourd’hui, le « sujet » se fait de plus en plus divers, ce que renforce la démultiplication des médias, à commencer par le cinéma ou les séries TV.
Un autre aspect crucial est le registre : le roman policier n’appartient-il qu’à la littérature populaire ? Quid de la valeur littéraire indéniable de certains ouvrages ? A l’inverse, des ouvrages relevant de ce qu’on appelle la « grande » littérature, les tragiques grecs, Shakespeare, Dostoïevski, Racine, Mickiewicz, mais aussi le conte du « chaperon rouge » ou la Bible font appel au motif du crime. Julian Symons affirme que le lecteur n’aura pas de mal à dissocier ceux où le crime est la donnée majeure de ceux où il est secondaire. Mais est-ce bien vrai ? Porter ou Caillois ont recours à la catégorie du « mythe » et du « sacré » qu’ils opposent au pur plaisir, avant tout cognitif, suscité par la résolution des énigmes policières. Cela dit, de nombreux romans policiers explorent la dimension psychologique et morale de l’existence humaine.
Qu’en est-il du rapport du roman policier à la question du réalisme ? On entend dire de plus en plus que le roman policier vise à représenter le fonctionnement d’une société, ses « faces sombres », bref – que les auteurs de polars sont les meilleurs « peintres de la vie moderne » contemporaine. Barzun, Taylor ou John Caweltie ont toutefois montré que la construction de l’intrigue des romans policiers s’inspire de schémas narratifs transculturels tandis que les personnages ont partie liée avec des « types » qui peuplent nos imaginaires.
En Pologne, l’ouvrage pionnier datant de 1932 de Stanisław Baczyński, Powieść kryminalna, soit « Le Roman criminel », a imposé l’utilisation de ce terme. Depuis la sortie du pays de la zone d’influence soviétique, le roman policier et le polar y sont devenus un phénomène très expansif. Parmi ses promoteurs on trouve aussi des poètes (Jarosław Klejnocki, Marcin Świetlicki) et des chercheurs en littérature (Marek Krajewski, Mariusz Czubaj, Zbigniew Białas).
Les femmes sont de plus en plus nombreuses à « pratiquer ce genre », et cela concerne tout autant des écrivaines qui en ont fait leur spécialité (ainsi Katarzyna Bonda, Marta Guzowska, Magdalena Parys, Joanna Jodełka, Marta Mizuro, Gaja Grzegorzewska, Nadia Szagdaj, Anna Fryczkowska) que des écrivaines déjà reconnues en tant qu’écrivaines « tout court » comme Olga Tokarczuk ou Joanna Bator. Que nous proposent ces « noires Polonaises » ?
Ces évolutions récentes du genre invitent à repenser ses traits définitoires et à replacer ceux-ci dans une perspective d’ensemble permettant de les situer par rapport aux modèles traditionnels.
 
Chercheurs associés au projet : Bernadetta Darska, Université de Varmie-Mazurie d’Olsztyn,  Barbara Łagiewska, Académie Jan Długosz de Częstochowa, Anna Wróblewska, Université de Silésie, Rafał Szczerbakiewicz, Université UMS de Lublin, Maria Berkan-Jabłońska, Université de Łódź, Małgorzata Domagalska, Université de Łódź, Marta Tomczok, Université de Silésie, Marion François, Grenoble, Michela Toppano (Aix Marseille Univ, CAER, Aix-en-Provence, Alessio Berré (Université d’Avignon/CRIX Paris Ouest), Dror Mishani (Université de Tel Aviv)
 
Principales collaborations : Institut culturel polonais à Paris et d’Europe centrale (tchèque, hongrois, autrichien), Paris-PAN
 
Opérations de recherche envisagées :
  • Un colloque international
  • Organisation de tables rondes en collaboration avec les instituts culturels des pays d’Europe centrale
  • Création d’un site internet 
Mots-clefs : Thématique interdisciplinaire et transnationale, « roman policier », contemporanéité, culture populaire et culture élitaire, changement de paradigme, femmes-écrivains, multiculturalisme, métissage, minorités, réalisme, société, genres littéraires.